Que penser d'Été 93 ? Oui c'est un film sur l'enfance à hauteur d'enfant. On ressent en l'occurrence une touche personnelle, un ressenti et une mise en image d'une expérience douloureuse. Et pourtant, l'authenticité que l'on aurait pu espérer de cette oeuvre est alourdie par les poncifs habituels : l'enfant gâté égoïste, l'enfant qui entraîne l'autre et n'assume pas ses erreurs, l'enfant qui prie la vierge pour revoir sa maman, l'enfant qui fait sa mini-fugue, etc. On a droit à tout cela et, de vous à moi, ces situations n'ont rien de particulièrement original. Certes il y a la justesse du jeu des enfants, le regard superbe de la petite orpheline et la communion avec la nature environnante, un peu sauvage et magique pour l'enfant de Barcelone, mais il serait bon de souligner le manichéisme et la dichotomie qui imprègnent ce J'en veux pour preuve l'image reflétée par les grands-parents - la grand-mère en particulier - incarnant l'ordre ancien, la foi chrétienne, une certaine forme de conservatisme et de stabilité rassurante. Comment faire plus stéréotypé ? Et quel adulte comprend finalement mieux les enfants et leur sert de passerelle pour rejoindre l'univers des adultes ? Mais une naine bien évidemment ! Une adulte à taille d'enfant... Qu'en penser ? Je vous laisse juge... Enfin il serait dommage de ne pas souligner le caractère identitaire et revendicatif de ce film qui n'a pas grand chose d'espagnol : on est en Catalogne, on ne parle que le catalan. Ce sera ainsi jusqu'au dernier souffle du générique final. Est-ce un mal ? Pas vraiment. Mais un film sur une blessure d'enfance doit-il servir de tribune nationaliste ? En effet, L'espagnol a été conservé uniquement pour l'usage d'une cassette audio de chansons enfantines, ainsi que pour une courte scène de fête de village sur des airs latino-américains. Un air futile. En dehors de cela la langue la plus parlée, la plus usitée en Catalogne - le castillan - est totalement évincée, occultée, marginalisée. Ce qui est tant un non-sens qu'une aberration dans la vie quotidienne catalane. Les deux langues s'entrecroisent la plupart du temps. Faut-il encore rappeler que nous étions en 1993, un an après les JO de Barcelone ( sa mascotte le rappelle sur un t-shiri de Frida), une période durant laquelle le côté revendicatif était certes existant, mais pas encore obsessionnel... Ce caractère catalaniste va revenir à maintes reprises, notamment lorsque l'enfant brandira fièrement le drapeau de la région aux aspirations séparatistes. Ces petites références un peu pesantes, que vous retrouverez çà et là dans le récit peu, m'ont mené à cette réflexion : en poussant le champignon au maximum, la réalisatrice aurait pu carrément faire parler la grand-mère en castillan. Non ? Cela aurait été la meilleure illustration du parti pris. Là, cela aurait sans doute été trop stéréotypé, trop appuyé... Trop Espagne de papa, trop franquiste ! Bref, si Été 93 se laisse regarder sans déplaisir, avec un attendrissement certain et une dose d'émotion, il faut savoir reconnaître ses nombreuses scories qui tapissent le chemin de montagne à l'ombre des feuillages... C'est dommage. Je dirai donc que ce film catalan est un peu bancal, parfois lent et souvent prévisible dans ses situations de tension, mais qu'il ne manque pas de douceur. Moyen mais peut satisfaire.