Dès son apparition dans la sélection de la Quinzaine de Réalisateurs, Un beau soleil intérieur s'annonçait comme une oeuvre mineur de Claire Denis, qui présentera High life l'année prochaine. Ce petit impasse, soit-disant, ne semblait qu'un rôle cadeau pour Juliette Binoche dans une comédie légère. Mais quel erreur! Quel plaisir de voir ce film fleurir sur l'écran avec un sujet si simple qui brise nos expectatives! Denis laisse pour une fois de côté la cruauté et les personnages marginaux qui ont enrichi son cinéma pour nous décrire une figure féminine plus conventionnelle et pourtant d'une puissance et honnêteté qu'on ne retrouvait pas depuis les meilleurs œuvres de Rohmer.
Binoche joue le rôle d'une femme qui vit sa maturité dédiée exclusivement à la recherche de l'amour. Dès la formidable scène de lit initiale on comprend que pour elle le bonheur arrive grâce au sacrifice et à l'effort, soit il vrai ou pas. Ceci sera prouvé par le fait qu'elle renonce au plaisir individuel de l'orgasme pour bien partager un bon moment avec quelqu'un. Une femme qui ne se permettrait de rien laisser au hasard, surtout les petits détails qui pourraient faire dérailler une relation ou sa joie. L'espoir d'être heureuse, même si des fois l'obstination nous mène aux mauvaises décisions qui nous font perdre le nord.
Un banquier minable, un comédien imbu de lui-même, un ex-mari méconnaissable, un homme si humble comme respectueux, un mystérieux gentleman qui ne veut pas gâcher une amitié... Le film se base sur une succession de conquêtes amoureuses que la protagoniste, désenchantée, laisse derrière. Alors, comment sentir un peu d'empathie pour cette cliché de parisienne bobo si éblouie par elle même et ses proches qu'elle est incapable de trouver son bonheur? Grâce au texte, sincère, sans aucun doute. Denis supprime tout artifice technique pour qu'on capte une héroïne transparente. Un personnage si complexe en ses pensées comme accessible à ses sentiments. Une honnêteté si frappante, si évidente, qui fait impossible ne pas s'émouvoir suivant son odyssée, jour après jour, ou soir après soir.
Revenant à Rohmer, Marie Rivière dans Le rayon vert jouait aussi un rôle à priori antipathique qui, toutefois, réussissait à nous toucher. Cette femme navrée par l'incompréhension des autres jusqu'au dernier moment où elle verra ce dernier rayon du soleil à la couleur de l'espoir qui provoquera un changement. Par contre, le personnage de Binoche devra créer ce soleil intérieur toute seule, et pas forcement de la meilleure façon.
La magistrale scène finale devant le médium qui lui donne des indices à suivre se voit interrompue par les génériques de la fin. Nous, le public, perdons alors toute espoir dès qu'on commence à lire les noms des acteurs, du personnel technique et de la réalisatrice, qui nous dissent au revoir. Le récit est terminé pour tous sauf pour notre protagoniste, qui continue à illuminer la salle avec son sourire et ses yeux, accrochée à toute possibilité d'être heureuse, sans lâcher prise, sans désister, sans reconnaître l'échec refusant l'obscurité.
////////////////////////////////////////Encore plus de fautes et d'erreurs sur hommecinema.blogspot.fr