Bon, ce film fait son effet, il ne faut pas se mentir ni avoir peur de s'ennuyer juste parce qu'il semble un peu banal quand on lit le résumé. C'est vrai que des histoires de gosses qui tournent mal dans les quartiers défavorisés et qui finissent finalement par trouver un meilleur chemin, c'est courant. Sauf qu'ici, on assiste non seulement au quotidien difficile que peuvent vivre les jeunes habitants dans des coins dangereux comme ceux filmés dans Shéhérazade, surtout quand ils sont laissés à l’abandon par leurs proches, mais aussi à une réflexion sur la manière dont on peut comprendre et éduquer nos enfants dans ce mode de vie, présent en France et ailleurs dans le monde. Zachary, un mineur...qui vient tout juste de sortir de prison et qui s'échappe aussitôt de son foyer d'accueil pour aller retrouver sa mère, qui étant dans la misère, ne veut pas l'accueillir. Voilà comment débute le film, c'est déjà bien corsé comme situation pour un garçon de cet âge. Et ça n'a pas loupé, il se lance dans tous types de délits sans prendre conscience de la gravité des faits, aveuglé par sa triste vie mais sur sa route il s'attache à une jeune demoiselle qui pratique la prostitution pour survivre. De là, s'enchaînent les problèmes de plus en plus graves, proportionnellement aux prises de risques que Zakchary décide de franchir dans son aventure à la disgression. Il fait totalement l'inverse de ce qu'il faut faire quand on sort de prison. On pourrait croire qu'il est têtu mais non ! C'est là le plus du film, ça nous apprend à entrer dans la vie des jeunes issus de quartiers comme ceci, rien n'est facile. On a parfois du mal à intégrer que ces jeunes ont le choix soit de rester dans la misère, soit d'essayer d'en sortir à travers le danger et l'illégalité en mettant en péril leur propre liberté et donc au final, de rester encore plus dans cette misère. On ressent l’adrénaline tout au long du film, on se demande si il va réussir à faire ses affaires sans éraflures. Jusque là, rien d'impressionnant par rapport aux autres films du genre mais l'originalité vient par la suite. La jeunesse des quartiers difficiles a souvent du mal à voir dans ses possibilités une façon d'aller mieux sans commettre de délits. Jean-Bernard Marlin nous éclaire un peu mieux les yeux dans un scénario bien ficelé. C'est quand vient cette présence féminine et rassurante pour Zachary, que le film prend une autre tournure, bien plus intéressante. En effet, entre amour et amitié, le jeune héros va devoir choisir. Et oui, on ne peut pas tout servir sur un plateau dans la réalité. Le mal, ça coute cher mais le bien, ce n'est pas gratuit non-plus. Il s'agit alors d'un combat de force entre ces deux valeurs (amour et amitié) par le biais d'autres valeurs comme la loyauté (au sein des règles d'une cité) et le bonheur de la vie (porté par le fait d'apprendre à laisser les mensonges et le feu de côté pour enfin apercevoir un brin de vraie vie). Nous assistons à une histoire prenante qui contient certaines scènes assez dures pour un jeune public, et à une philosophie cachée qui nous pousse à réfléchir sur ce qui a de la vraie valeur dans ce monde et qui peut nous élever vers un autre chemin. Ce qui fait de ce film, un grand film c'est que ce n'est pas un film d'amour, ni un film de quartiers, mais les deux en même temps. "L'esquive" d'Abdellatif Kechiche, des années plus tôt, avait aussi proposé ce double-thème au sein de son œuvre mais il y a tout de même encore un plus ici. Cette œuvre est limite une scène de théâtre où se déroule un combat entre amitié et amour, mais avec en parallèle une leçon d'éducation des parents envers leurs enfants. Bien que la fin soit belle, elle ne l'est que sur la forme mais pas dans le fond. Et pourtant les deux héros ont l'air heureux, bizarre non ?! C'est la force du film. Toujours emmener les jeunes vers la difficulté plutôt que la facilité. Les valeurs intérieures sont plus fortes que le matériel. Une œuvre qui pour moi, est destinée non seulement aux jeunes mais aux parents. L'éducation dans ce contexte là doit être basée sur des valeurs sûres comme l'amour, le travail, le courage, l’honnêteté et les responsabilités. Oui, c'est au moment où la mère conseille à son fils de laisser l'amour de côté et de défendre l’indéfendable, juste pour éviter une nouvelle peine (qui au final pourra lui être plus propre) sous prétexte qu'il faut respecter les codes de la rue, qu'on sait que ce film n'est pas qu'un simple film qui regroupe uniquement des scènes de délinquance du début à la fin. C'est surtout une belle leçon de vie, aux images crues issues d'un contexte précaire. Un bonus pour Dylan Robert, qui de son jeune âge joue parfaitement son rôle, à croire qu'il est comme cela dans la vraie vie. Encore une réussite !