Tout au long de sa filmographie, en recourant à des approches très variées, Xavier Giannoli a interrogé la croyance comme moyen de matérialiser une abstraction ou une illusion : après un anonyme devenu célèbre sans motif et une exécrable cantatrice convaincue de son talent, c’est un reporter de guerre, traumatisé par la mort de son photographe sur le terrain, qui se voit confier une mission par le Vatican : enquêter sur une supposée apparition mariale qui serait survenue dans le sud-est de la France. Mal à l’aise face à l’afflux incontrôlable de pèlerins et la transformation de la jeune voyante en icône, le diocèse a réclamé une investigation menée à la fois par des religieux et des laïcs. Toute cette partie introductive s’avère fascinante quand on ne connaît rien à la manière dont fonctionnent les enquêtes canoniques, notamment le fait que l’Eglise, plus prudente qu’on ne l’imagine, préfère largement ignorer un véritable miracle qu’en reconnaître un faux. S’il est question de foi, il est forcément question de doute, et la meilleure base de travail était clairement de choisir cet homme sécularisé et peu intéressé par le fait religieux sans pour autant lui être hostile, qui tente de dégager une vérité sur cette jeune femme énigmatique qu’on devine en proie à une insoutenable souffrance intérieure, dont on ne sait pas avec certitude si elle est manipulée par les prêtres qui l’entourent et semblent plus ou moins soutenir le grand barnum bondieusard qui se développe autour du lieu miraculeux. Ce sont les relations, d’abord teintées de méfiance, entre la jeune femme et le journaliste incrédule, qui dominent la seconde partie. Sur le plan de la vérité, Giannoli évite de se positionner de façon nette : comment tirer une conclusion objective sur ce qui relève, par définition, de l’acte de foi et de la subjectivité ? Pour se tirer de ce mauvais pas, le réalisateur emprunte une voie de traverse qui laisse subtilement la porte entr’ouverte sur la question de la réalité de l’apparition, position qui pourrait se résumer par un “Ni oui ni non, bien au contraire”. D’ordinaire, je suis plutôt partisan des voies médianes, a fortiori si elles sont exécutées avec intelligence, mais sur la question particulière de la Foi, il m’a toujours semblé clairement préférable qu’un réalisateur fasse clairement pencher la balance du côté qui sied à ses convictions, quitte à ce qu’en tant que spectateur, on ne les partage pas.