Xavier Giannoli poursuit une thématique qui le suit de près ou de loin depuis plusieurs œuvres de sa filmographie. Après, entre autres, l’escroc qui va se rêver responsable de chantier et embobiné toute une commune dans « A l’origine » ou la bourgeoise sans voix se rêvant chanteuse d’opéra dans « Marguerite », le revoilà traitant du sujet de l’imposture dans « L’Apparition ». Mais, encore une fois, le contexte et le genre sont complètement différents ici. Cependant, il est passionnant de voir un auteur se focaliser sur le même thème de manière radicalement différente au gré de ses long-métrages avec une obsession quasi unique dans le cinéma français. Ici, il est question d’une enquête sur les apparitions de la Vierge Marie à une jeune fille. Se greffe donc à l’éventuelle imposture de celle-ci, un film d’investigation en forme de thriller et un film psychologique sur la foi. Très beau programme, d’ailleurs plutôt bien étudié, mais encore une fois beaucoup trop long comme souvent chez Giannoli.
La mise en place du film - toute la première demi-heure - est un modèle d’explication des faits et de mise en jambe cinématographique. Le metteur en scène expose les enjeux de la manière la plus fluide et limpide qui soit. Il parvient à rendre l’accroche de « L’Apparition » à la fois intrigante et prenante sur un thème intéressant qui s’est très rarement vu traité par le cinéma français. On pense d’ailleurs à toutes cette vagues du début du millénaire provenant des Etats-Unis où sortaient des films à tendance fin du monde exploitant religion et satanisme (« La Fin des temps », « Les Âmes perdues », …). Ici c’est un peu le pendant naturaliste et film d’auteur de ce type de film, on pense notamment à « Stigmata », certainement l’un des meilleurs fleurons du genre. Sauf qu’ici pas de scènes horrifiques, pas de moments d’angoisse, plutôt un thriller au traitement prosaïque mêlé à un questionnement sur l’aspect surnaturel de la religion et l’identité. Et si ces atermoiements sur la notion d’imposture ont donc déjà été vus, on apprécie quand le réalisateur convoque le film d’enquête et suit un Vincent Lindon en quête de vérité. D’ailleurs le comédien, à l’air fatigué comme jamais, est encore une fois exemplaire.
Mais plus le film passe, plus le temps se fait long. Giannoli oublie encore une fois d’être plus concis et elliptique et n’évite pas les redondances dans certains passages qui auraient pu être coupés. Et si la fin se pare clairement de fantastique dans son refus d’explications, on aurait tout de même aimé quelle soit moins précipitée et en savoir plus. En l’état elle nous apparaît un peu décevante. C’est dommage car le sujet est passionnant et n’oublie pas en passant d’égratigner les faiseurs de miracle et la commercialisation opportuniste de ceux-ci. On peut également louer la beauté de certains plans du cinéaste comme l’errance finale de la jeune Gallatea Bellugi (une révélation) ou ce travelling avant sur des plumes de matelas s’échappant d’une pièce de couvent, scène aussi belle qu’un véritable tableau de maître. « L’Apparition » est donc un film rare, intéressant, peut-être le plus abouti de son réalisateur mais il pêche par une fin exsangue et surtout une durée beaucoup trop généreuse qui peut parfois lasser son spectateur. Et, conséquemment, l’empêche d’être le bon film qu’il aurait pu être.
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