La Ciotat, son histoire socio-politique et des jeunes aux diverses origines familiales, accueillent avec mépris une écrivaine parisienne qu'ils jugent de prime abord hautaine et privilégiée. Elle anime un atelier d'écriture à but d'insertion sociale. Écrire un roman noir est l'objectif, et pour cela, il faut réfléchir, en groupe, au mobile du meurtre à mettre en scène.
Et c'est en cherchant les raisons du tuer que sont évoquées les raisons de vivre.
Dans le groupe de jeunes, la petite-fille d'un de ces ouvriers raconte comment les combats syndicaux les réunissaient contre un système qui voulait faire disparaitre leur moyen de subsistance. Un autre multiple les insultes extrémistes et fédère ainsi ce groupe disparate contre lui.
Le jeune fascistoïde ne déploie d'ailleurs aucun argumentaire, juste les clichés insultants propres aux sympathisants de ce bord. Et dès lors, chacune de ses prises de paroles est conspuée. Les autres participants n'argumentent pas pour lui montrer ses erreurs de jugement. L'écrivaine non plus, elle se contente de condamner ses propos : son rôle n'est pas d'éduquer, elle enseigne l'écriture.
Et ce n'est pas non plus le sujet du film : beaucoup ont fait l'erreur que de croire que l'adhésion à ces thèses était en question. Pourtant le questionnement de ce jeune homme à propos des motivations des terroristes du Bataclan indique un angle bien plus riche : ces gens n'ont-ils pas cherché à poursuivre des buts intimes, en les parant de valeurs religieuses pour les anoblir aux yeux de certains ?
Finalement, le cœur du film, est l'opposition entre, d'un côté, le passé de la vie des chantiers navals suivie de la lutte pour que s'y poursuivent les constructions grandioses, et d'un autre côté, les tentatives actuelles de construction d'une nouvelle façon de vivre sur les ruines d'une société qui s'anesthésie par tous les moyens pour ne pas penser qu'elle vit ses derniers instants. Les radicalisations évoquées dans le film proposent la régression passéiste et l'exclusion arbitraire, comme si des idées simplistes pouvaient simplifier l'existence. Le vivre ensemble est un travail, avec des contraintes et des frustrations, mais avec pour résultat une construction : comme dans un Atelier.
Les comédiens sont tous excellents, la réalisation soignée, et le scénario ne tente pas de fabriquer des héros et des ordures, il met en scène des gens faillibles et blessés, sans grandeur, sans philosophie ronflante ou cynisme cinglant. Seul défaut véritable : le point culminant du film est un peu faible en émotion, peut-être parce qu'en fait on ne s'attache pas vraiment aux personnages sans doute trop ordinaires.