Avec Le Goût du tapis rouge, le réalisateur Olivier Servais a voulu donner la parole au public, aux techniciens, aux travailleurs du festival de Cannes et regarder ceux qui regardent pour se détourner de la vision officielle. L’histoire racontée est alors collective, celle de gens ordinaires qui vivent l’événement chacun à leur façon. Ceux dont on ne parle jamais, ceux qui sont omniprésents mais qu'on ne voit pas, ceux qui font à leur manière le festival tel qu'il est et sans qui ce dernier n’existerait pas.
Le cinéaste Olivier Servais explique pourquoi il a voulu se pencher sur les anonymes qui font également le festival de Canes :
"Cannes est un microcosme du monde social d’aujourd’hui avec ses hiérarchies, ses privilèges, ses richesses mais aussi ses travailleurs, ses commerçants, ses sans-grades qui cherchent désespérément un contrat. C’est enfin un public : badauds, cinéphiles, vendeurs à la sauvette ou même sans-abri. Toutes ces personnes essayent de se trouver une place dans cette folie cannoise, celle des autorisations et des interdits. C’est ce petit monde, très divers sur bien des aspects, que j’ai essayé de filmer."
Voici quelques personnalités cannoises mises en avant dans Le Goût du tapis rouge. On y rencontre Jean, le retraité, cinéphile, accrédité, qui court de salle en salle, pour voir les nombreux films sélectionnés dans les différentes compétition. Quant à Michèle, elle se place à la sortie du Martinez, le palace préféré des stars, espérant enfin apercevoir ses acteurs favoris et prendre furtivement quelques photos. On voit aussi Manu l’éboueur, qui debout à 2h du matin, prend son service de nettoyage et arpente la ville endormie avec son camion à eau. Nous suivons également Roseta, la femme de ménage embauchée
pour renforcer l’équipe du palace préféré des stars durant le festival : le Martinez.
Olivier Servais a souhaité être très précis dans ses intentions et ses choix, préparant son tournage avec soin :
"Le projet était très écrit, l’intention d’auteur précise, les lieux de tournage repérés, les autorisations demandées, les personnages bien définis. (...) Si les personnages étaient prédéfinis, les personnes interrogées n’ont pas été «castées». Un peu comme une enquête par quotas, que les consignes obligent à respecter. On peut donc dire que le hasard a été fortement guidé."
Le metteur en scène Olivier Servais confie ses difficultés durant son tournage sur la Croisette :
"Cannes présente, du point de vue du tournage, deux traits opposés : d’un côté, il est extrêmement facile de tourner, de sortir caméra et micro pour prendre des images, parce que tout le monde filme et photographie. L’image et les écrans sont partout. Par contre, les lieux privés et protégés sont très difficiles d’accès pour des raisons de sécurité. Les passe-droits n’existent pas et les autorisations de filmer sont rarement accordés."