Sur les affiches, les réalisateurs sont désignés par leurs seuls prénoms Nana et Simon: il s'agit de Nana Ekvtimishvili et Simon Gross. Une famille heureuse est un film géorgien, donc rare.
Le point de départ de l'intrigue se retrouve dans de nombreux films contemporains: une mère de famille, professeur, décide, le jour de son anniversaire, de ne pas le fêter et de quitter le domicile où s'entassent plusieurs générations, des grands-parents aux petits-enfants adolescents. Scandale dans la famille! Tous vont tenter de retenir la femme indigne, celle qui ne respecte pas les traditions, la soumission à l'ordre patriarcal, le jeu de rôles imposé par la société.
Têtue, indifférente aux reproches de sa mère qui, elle, n'a jamais quitté sa cuisine, laissant ses enfants se débrouiller avec leur propre vie, elle va s'installer seule dans un petit logement, où elle peut, enfin, écouter de la musique et le bruissement des feuilles d'arbres, tout en continuant de corriger ses copies.
Un film qui réserve des moments vrais de bonheur égoïste, où les autres sont oubliés parce qu'ils ont trop empiété sur le jardin privé de l'héroïne; un film où, finalement on se sent bien, car les Géorgiens ont le sens de la fête et du chant; ; un film où l'on rit parfois des hommes qui se veulent protecteurs mais où les femmes osent s'exprimer et évoquer leur sexualité subie; un film où la caméra ne fait pas les pieds au mur, mais où on respire la vie et la ville.
Un film incarné.
La famille n'est évidemment pas le refuge du bonheur, comme le titre nous l'a ironiquement indiqué: elle est l'endroit du mensonge, de l'hypocrisie. Le dernier plan laisse planer un doute sur le pardon accordé à celui qui a trompé cette femme.