Il y en a eu un paquet, des adaptations de ‘Pinocchio’ ces dernières années. Entre l’atroce portage Live de la version Disney par Robert Zemeckis et la belle audace de Guillermo del Toro de travestir (avec succès) le conte à sa manière, j’attendais surtout cette version-ci que je supposais plus fidèle parce qu’italienne et parce qu’elle était l’oeuvre d’un auteur qu’on sait désormais à l’aise avec le fantastique et le conte (le brillant ‘Tale of tales’). Pourtant, le ‘Pinocchio’ de Garone, même s’il est évidemment plus fidèle au texte de Collodi (il reprend plus ou moins les mêmes séquences que la maladroite version de Benigni de la fin des années 90, lequel tient d’ailleurs cette fois le rôle de Gepetto), ne reste pas moins très édulcoré car ouvertement destiné aux enfants. Certes, le renard et le chat pendent le pantin à un arbre dans l’espoir qu’il lâchera ses pièces d’or une fois mort, certes la scène des croque-morts chez la fée bleue est toujours de la partie…mais dans l’ensemble, la démonstration reste un peu trop lisse, prend toujours garde de ne pas aller trop loin, de ne même pas suggérer qu’elle aurait pu aller plus loin, et Garrone accorde une certaine importance à des figurants tout à fait secondaires (le singe-juge, l’escargot-gouvernante,...), pour la simple raison qu’il estimait qu’ils allaient plaire aux enfants. Or, ce que j’aime beaucoup dans l’histoire de Pinocchio justement, c’est la délicieuse cruauté dont Collodi fait preuve, et le comportement quasi-irrécupérable du pantin de bois : il y avait donc moyen de travailler cette base littéraire de beaucoup de façons différentes, soit en suivant littéralement (ce qui aurait eu un petit côté provocant) la morale de châtiment et de rédemption par la souffrance du conte, soit en prenant son total contre-pied. Garrone a malheureusement surtout choisi de rester illustratif, avec pour conséquence que le film, très réussi visuellement, semble un peu “vide”.. Heureusement, il existe au moins une excellente raison d’apprécier son travail et elle tient à sa volonté d’en rester à une démarche très artisanale pour le maximum d’effets spéciaux : recourir en priorité à des prothèses, du maquillage et des maquettes dans un univers où on rencontre des insectes, des animaux et des poupées qui parlent, représentait un défi certain mais le résultat est charmant et possède une magie rétro qu’aucun effet numérique ne peut atteindre.