Après avoir enchanté les fans du genre avec deux épisodes de haute volée ("Le cauchemar de
Dracula" et "Dracula prince des ténèbres"), la Hammer commençait à montrer quelques signes d’essoufflement avec "Dracula et les femmes"… ce que "Une messe pour Dracula" vient confirmer. Non pas que le film soit mauvais (il est même supérieur à son prédécesseur à bien des niveaux, à commencer par son scénario et la qualité des seconds rôles), c’est juste qu’il porte les stigmates des motivations purement mercantiles de ses producteurs qui se montrent bien plus soucieux de faire rentrer de l’argent (en épuisant leurs lucratives sagas) que de faire preuve d’audace et d’originalité. On retrouve, donc, les mêmes ficelles
(Dracula qui ressuscite à nouveau, les filles du casting qui vont tomber sous son regard hypnotique, le jeune premier qui va tout faire pour sauver sa belle…)
, agrémentées d’une violence plus frontale et d’une dose de sexe plus clairement affichée
(les danseuses nues, la jeune Lucy filmée comme un fantasme pour amateurs de jeune vierge…)
. Et surtout, choix étonnant quand on sait les efforts que la Hammer a dû déployer pour le convaincre de rempiler dans le rôle-titre, on attend près de
45 minutes
avant que Christopher Lee ne pointe ses crocs (exception faite de la rapide scène d’intro faisant le lien avec l’opus précédent). Ca fait long pour un film de vampire… Son arrivée ne brille, d’ailleurs, pas par sa subtilité et son interprétation n’est pas forcément la plus marquante de la saga. La faute en incombe, sans doute, à la lassitude de l’acteur (palpable) et aux dialogues dont il s’est vu armer (assez basiques même si Lee nous régale lorsqu’il se livre à son décompte de victime avec une diction à faire frissonner). Mais, surtout, Dracula a droit
à une mort assez risible qui ne fait pas honneur à son rang.
Dès lors,
son absence pendant plus de la moitié du film
constitue, paradoxalement, un des points forts du film puisque les scénaristes ont pu s'intéresser aux personnages dits secondaires (et qui sont, en réalité, les personnages principaux), à commencer par cette surprenante confrérie de notables à la recherche de plaisirs interdits (Geoffrey Keen, Peter Sallis et John Carson). Le portrait de ces trois personnages est gentiment grinçant envers la "bonne société"
(à titre, d’exemple, Hargood exige de sa fille un comportement irréprochable alors qu’il fréquente les bordels et assiste à une messe noire)
et, surtout, étonnement dense…
surtout pour des victimes en devenir
. Leurs enfants (dont Linda Hayden, Anthony Corlan et Isla Blair) sont, également, intéressants même si leurs liens avec leurs parents auraient gagné à être davantage exploités. Mais la bonne surprise du film, c’est incontestablement, la prestation fiévreuse de Ralph Bates, véritable révélation épatant de charisme. Il campe un dandy dépravé
(par qui la catastrophe va arriver)
qui balaie tous les autres seconds rôles de la saga (à l’exception notable de l’indépassable Peter Cushing qui manque, décidemment, beaucoup à Dracula).
On ne peut que regretter qu’il disparaisse si vite de l’intrigue. C’est, d’ailleurs, à compter de sa mort que le film perd en intérêt ou, plutôt, qu’il redevient particulièrement classique.
Pour le reste, "Une messe pour Dracula" peut toujours compter sur le charme des productions Hammer (décors à l’ancienne, image typique, musique de James Bernard…) même si la mise en scène de Peter Sasdy souffre de certaines longueurs et d’effets de mise en scène discutable (voir le zoom calqué sur le rythme cardiaque… qui reste moins ridicule que le halo rouge du précédent opus). Ce quatrième opus de l’ère Christopher Lee est, donc, parfaitement regardable mais ne permet pas à la saga de retrouver son éclat d’antan.