En Roumanie, avant la chute du communisme, tout ce qui concerne le cinéma était sous le contrôle d’une entité unique en relation directe avec l’État, la « Centrala România-Film ». Des fonds avaient été alloués pour amener le cinéma à chaque habitant du pays, un important réseau de salles avait donc été créé et la Roumanie comptait alors 400 cinémas permanents plus un grand nombre de salles itinérantes.Aujourd’hui, România-Film a été privatisé et il ne reste plus qu’une petite trentaine de cinémas. Des cinémas dans lesquels les majors américaines règnent en maître et qui laissent très peu de place aux réalisateurs roumains, dont le succès est beaucoup plus grand dans les festivals du monde entier qu’auprès du public de leur pays.
Le réalisateur Alexandru Belc avait 9 ans lorsque a éclaté la Révolution roumaine de 1989 et il était déjà « accro » au cinéma lorsque cet événement s’est déroulé. C’est donc tout naturellement qu’il a voulu se pencher sur ce qu’étaient devenues, depuis, les salles de cinéma de son pays. Au départ, il avait prévu de faire le tour de tous les cinémas de Roumanie. Jusqu’au jour où il a rencontré Victor Purice, l’exploitant du cinéma de Piatra Neamt, une ville de 85000 habitants, située en Moldavie, au nord-est du pays, à 300 km de Bucarest. Victor Purice lui est vite apparu suffisamment attachant pour qu’il décide de consacrer son film à son histoire plutôt que de courir d’un cinéma à l’autre comme il en avait l’intention au début. Tout au long du film, c’est donc avec le sourire aux lèvres qu’on suit Victor Purice dans son travail quotidien. On le suit aussi en Allemagne où, grâce à un ancien apprenti employé par son cinéma et qui a trouvé du travail dans ce pays, il a été invité afin de réaliser un échange d’expérience. L’Allemagne, « un autre niveau de civilisation » pour Victor Purice.
Intéresser les spectateurs à un documentaire sur la vie d’une salle de cinéma d’une petite ville de Roumanie : voilà pour un réalisateur une forme de pari dont on peut penser a priori qu’il sera difficile à gagner. Eh bien, grâce à la véritable prestation d’acteur de Victor Purice, l’exploitant du cinéma Dacia de Piatra Nemt, grâce au montage très judicieux du film, on peut s’amuser à faire un autre pari : qu’une grande majorité de spectateurs abandonneront très vite toute forme d’a priori négatif pouvant provenir de la lecture du synopsis.