Avant de s'introduire dans "Je danserai si je veux", il est peut-être bon de commencer par rappeler deux faits qui ne sont peut-être pas évidents pour tout le monde : les arabes israéliens représentent un peu plus de 20% de la population de l'état d'Israël, ce qui fait donc d'eux, à la fois, des palestiniens et des israéliens. Parmi eux, tous ne sont pas musulmans : 7 % de la population arabe israélienne est de confession chrétienne.
Ce premier long métrage de la palestinienne israélienne Maysaloun Hamoud propose une chronique a priori pleine d'intérêt sur la vie à Tel Aviv de trois jeunes femmes, trois arabes israéliennes qui partagent la colocation d'un appartement. Layla, une avocate, et Salma, à la fois DJ et barwoman, sont deux "femmes libérées" ou, du moins, le croit-elle. Nour, nouvelle venue dans la colocation, est, au contraire, une musulmane fervente qui porte le voile et dont le fiancé, Wissam, son fiancé, refuse de serrer la main des femmes et voit d'un mauvais œil le fait que Nour s'entête à poursuivre des études d'informatique dans le but de pouvoir apporter sa contribution financière à son futur foyer, au lieu de consacrer tout son temps à son mari, à ses enfants et à la religion.
Chronique pleine d'intérêt ? C'est ce qu'on espérait. La réalité, malheureusement, n'est pas toujours à la hauteur de cette espérance. Il y a d'abord le fait, (trop) longuement évoqué dans la première moitié du film, que, pour Layla et Salma, leur émancipation consiste principalement à se pochetronner régulièrement, à fumer comme des pompières, y compris quelques joints de temps en temps, et même à fréquenter la coke lors des fêtes qu'elles fréquent assidument. Vision réaliste et majoritaire ? On ose espérer que non ! En plus, comme si cela ne suffisait pas, la réalisatrice se plait à filmer cette prétendue "joie de vivre libre" avec beaucoup de complaisance, calquant l'esthétique de son cinéma sur ce qui se fait à New-York ou dans des séries américaines telles que "Sex and the City". En fait, l'intérêt majeur de cette première partie du film réside dans ce qu'il nous montre de Nour et de ses rapports avec son fiancé.
Heureusement, le niveau remonte lors de la deuxième moitié de "Je danserai si je veux", lorsque le film s'attaque aux problèmes rencontrés par les trois jeunes femmes : Ziad, le "fiancé" de Layla, qui, fumeur lui-même, ne supporte pas que Layla fume en public ; Salma, à qui sa famille, d'obédience chrétienne, n'arrête pas de proposer de futurs maris potentiels, des hommes qu'elle refuse systématiquement d'épouser, et qui, à juste titre, n'ose pas à avouer à ses parents que sa préférence va vers les femmes et non vers les hommes ; Nour, enfin, qui, aidée par Layla, va comprendre que Wissam est un parfait Tartuffe. Des problèmes qui montrent que l'indépendance dont Layla et Salma semblaient si fières dans la première partie du film est loin d'être acquise et que, pour elles, le combat pour une véritable égalité avec les hommes sera encore très long et semé d'embuches.
Pour les interprètes des trois jeunes femmes, "Je danserai si je veux" représente leurs premiers rôles importants à l'écran et elles s'en tirent très bien, surtout Shaden Kanboura, qui montre avec beaucoup de justesse l'évolution de Nour, la partie la plus intéressante du film. Par contre, dans le rôle de Ziad, on retrouve un comédien qu'on a déjà souvent rencontré dans des rôles importants, Mahmud Shalaby : "Jaffa", "Une bouteille à la mer", "Les hommes libres", "Le fils de l'autre".