Momo est le second long-métrage de Vincent Lobelle après Les dents de la nuit en 2008 : "J’ai d’abord vu une captation vidéo de la pièce de théâtre puis j’ai rapidement rencontré Olivier Delbosc, le producteur du film, et enfin Sébastien Thiéry, l’auteur de la pièce. Nous avons réfléchi à la manière de travailler ensemble mais chacun dans nos domaines. L’idée était que lui s’occupe des acteurs et moi de la mise en scène proprement dite. Nous nous sommes tellement bien entendus que très vite ces limites sont devenues floues et que, l’un comme l’autre, nous avons empiété sur nos domaines respectifs !" À noter que Sébastien Thiéry co-réalise le film. Il se concentrait sur la direction d'acteurs quand Lobelle travaillait sur la mise en scène.
Momo est l'adaptation de la pièce de théâtre du même nom écrite par Sébastien Thiéry : "J’écris toujours sans me poser de questions, en partant d’une situation. Pour « Momo », j’ai fantasmé sur l’idée qu’un couple sans enfant voie quelqu’un débarquer chez lui en affirmant être leur fils et en les reconnaissant comme ses parents. Ce point de départ m’a motivé pour écrire la pièce et, presque malgré moi, les thèmes de fond se sont imposés : la maternité, le handicap aussi dans une moindre mesure. Je suis donc parti d’une situation absurde qui arrive à des gens « normaux »", déclare l'auteur.
Vincent Lobelle revient sur sa vision de l'esthétisme de Momo :
"J’ai des marottes en ce domaine et je suis venu avec ! Je voulais absolument que les codes esthétiques que j’aime se retrouvent dans le film. Mais il était hors de question que le film ressemble à une pub. Le travail le plus important dès le départ a été de trouver les décors pour que ce ne soit pas juste une histoire d’intérieurs. Il y a donc pas mal de séquences extérieures, de déplacements, pour que le mouvement s’impose à l’écran. Il ne s’agit donc pas d’une pièce filmée. L’autre chantier a consisté à essayer de ne pas ancrer le récit dans une époque précise et je crois qu’en voyant le film, on a du mal à savoir si ça passe aujourd’hui, demain ou il y a dix ans. Nous avons tourné en Belgique et je crois que ça ajoute aussi au côté visuel un peu inclassable du film.
Étant moi-même originaire du Nord, je connaissais ces ciels bas, les teintes beige-marron, la brique et la manière de filmer tout ça. Vous parliez du supermarché : c’est une des scènes sur lesquelles j’ai le plus travaillé. Nous avons tourné en semaine, au milieu de vrais clients et toutes les contraintes liées à un lieu public, il fallait que l’attention se concentre sur les personnages sans que ce soit moche pour autant autour. Enfin, en ce qui concerne la maison des Prioux, nous voulions sortir de l’univers visuel qui a beaucoup été associé à Christian Clavier : celui du bourgeois de province ou du nouveau riche, vivant dans les moulures et les dorures. Nous avons donc imaginé une demeure très contemporaine, meublée avec goût… Cela donne à son personnage un côté compact, plus ambigu."
Christian Clavier et Catherine Frot se retrouvent 35 ans après avoir joué ensemble dans Les Babas Cool de François Leterrier.
Avant que le projet ne tombe entre les mains de Vincent Lobelle, Christian Clavier et Catherine Frot étaient déjà engagés : "L’idée de les mettre en scène était très excitante", confie le réalisateur.
Vincent Lobelle évoque la performance de Christian Clavier : "Quand vous dirigez Christian Clavier, vous n’avez pas la prétention de lui dire comment jouer les choses ! Il est arrivé extrêmement préparé, avec ses idées sur le personnage et ce que nous avons fait nous, ça a été de lui demander de temps en temps de nous donner d'autres choses. Christian est très partant pour cela ! Les prises ne se ressemblent jamais avec lui, c’est une machine de guerre très impressionnante, quelqu’un d’extrêmement précis, de rigoureux, même si ce qui l’intéresse aujourd’hui, c’est de s’amuser sur un plateau. Et ce qui est intéressant, c’est que son jeu d’acteur est très différent de celui de Catherine Frot."
Vincent Lobelle revient sur sa collaboration avec Catherine Frot : "C’est une comédienne également très drôle mais qui fonctionne plus sur la sensibilité et d’ailleurs, son travail sur le film a été de jouer constamment sur cet équilibre. Il lui fallait passer de scènes de pure comédie à des moments beaucoup plus émouvants, douloureux même. J’ai été bluffé par sa capacité à plonger, se jeter dans ces scènes-là. Catherine est d’une sincérité absolue. Comme pour Christian, quand vous travaillez avec une comédienne de ce talent, il n’est pas question d’expliquer comment jouer une scène mais plutôt d’échanger et de partager avec elle notre vision de l’état intérieur de son personnage à ce moment du film, les émotions qui la traversent, des enjeux dramatiques… Je me souviens par exemple que le soir, après le tournage, elle m’appelait pour me faire une observation sur madame Prioux, posant des questions sur qui elle était, où elle allait… Ça l’a aidée à trouver le chemin de cette femme, une logique à son comportement. Ce qui a été très touchant avec Catherine et Christian, c’est qu’ils avaient envie de jouer ensemble et de se surprendre pour cette première fois ensemble à l’écran. Une émulation saine et bienveillante qui a beaucoup servi le film."
Vincent Lobelle parle de Sébastien Thiéry, interprète de Momo et co-réalisateur du film : "C’était un peu compliqué au début parce que Sébastien avait le stress du réalisateur, une sensation qu’il découvrait ! Il avait aussi la pression de jouer face à deux stars et il nous a fallu une petite période d’adaptation pour dépasser tout cela. Mais rapidement, il a su lâcher prise, me faire confiance et les choses ont été vite très fluides… Ça concernait par exemple son personnage de sourd et la manière dont nous voulions filmer ce handicap. C’est un sujet qui le touche personnellement puisque son frère est malentendant donc l’impact émotionnel au début était énorme. Mais lui comme moi avons très rapidement trouvé notre mode de fonctionnement. Ce n’était pas simple, parce que, au-delà de la dimension intime des choses, Momo est un texte qu’il a écrit et qu’il avait joué 300 fois donc Sébastien devait accepter de s’abandonner au regard et aux conseils de quelqu’un d’autre."