Certes, la traversée de la rivière entre la Birmanie et la Thaïlande est beaucoup moins dangereuse que celle entre l'Afrique et les côtes européennes, mais, une fois arrivés en Thaïlande, la vie des birmans devenus travailleurs clandestins n'est pas bien rose pour autant : recherche d'un travail, devenu de plus en plus difficile depuis que le fait de prétendre qu'on est en attente d'avoir un permis de travail ne suffit plus, l'avoir vraiment étant, en principe, devenu nécessaire ; rencontre permanente de la corruption chez les policiers et les fonctionnaires, l'argent de cette corruption ce cachant dans un journal et s'appelant "papier spécial".
"Adieu Mandalay" raconte l'aventure de deux jeunes birmans qui se sont rencontrés lors de leur arrivée clandestine en Thaïlande : Lianqing, une jeune fille volontaire qui cherche à obtenir un permis de travail le plus rapidement possible, qui, manifestement, ne veut pas s'encombrer d'un compagnon et dont le but ultime est de gagner suffisamment d'argent pour partir encore plus loin, à Taïwan par exemple ; Guo, amoureux de Lianqing, à la fois plein d'attentions pour elle tout en cherchant à lui imposer son parcours, et qui rêve, lui, de gagner de quoi s'acheter un commerce en Birmanie où il souhaite de toute façon revenir.
Très riche sur le fond, "Adieu Mandalay" est également formellement très réussi. En effet, le cinéma de Midi Z est fait de très beaux plans séquence, utilisant avec autant de bonheur plans fixes et travelings et se montrant aussi à l'aise dans la circulation de Bangkok, que dans l'usine de textile où travaillent un temps Lianquing et Guo ou dans la campagne tropicale où Lianqing va chercher les papiers dont elle rêve. On remarque particulièrement la façon dont le réalisateur transforme une scène qui, au mieux, aurait pu être convenue et, au pire, se serait révélée glauque, en une scène très surprenante et d'une grand poésie. Un très beau film, particulièrement prenant, sur les difficultés de l'émigration, où que ce soit.