Il y avait de quoi être un peu inquiet devant le pitch et l’affiche du nouveau film de Florence Quentin. Généralement, quand on écrit un film exprès pour réunir deux superstars du grand écran, on néglige un peu le scénario, on se dit que les noms sur l’affiche suffiront à faire venir un maximum de public, on laisse les deux vedettes cabotiner un peu et zou, le tour est joué ! Donc, je n’attendais pas mont et merveille de « Bonne Pomme » et je dois dire que, même si j’ai passé un moment plutôt agréable devant un film sympathique, mes craintes étaient quand même un petit peu justifiées. Florence Quentin ne fait pas dans l’originalité dans sa réalisation, l’intrigue est linéaire, elle s’articule autour du village où Gégé et Barbara se côtoient et s’apprivoisent et le garage de l’épouse de Gégé où tout le monde le cherche, sa belle-mère, son beau-fils, ses anciens collègues et même la police, tout le monde sauf son épouse légitime. Le rythme de son film est assez lent et d’ailleurs il y a un truc qui ne trompe pas : il tire inexplicablement en longueur, preuve que ce faux rythme probablement voulu (pour poser une ambiance, pour asseoir la psychologie des personnages…) finit par ne plus faire illusion au bout d’un moment. Dés le début, le film semble se chercher, les situations s’enchainent, elles finissent par se ressembler et au regard de la fin du film, force est de constater qu’il a beau s’être beaucoup cherché, le scénario ne s’est jamais réellement trouvé. Si l’on excepte les deux grandes stars que sont Gérard Depardieu et Catherine Deneuve et qui n’ont plus grand-chose à prouver, les seconds rôles sont assez écrits, plutôt bien croqués et plutôt très bien castés : Guillaume de Tonquedec (qu’on aurait pu mieux exploiter sans doute), Grégoire Ludig et encore Chantal Ladesou ont des rôles qui sont à la source de toutes les situations de comédie. On aurait quand même pu espérer un peu plus de finesse parfois pour certains personnages un peu caricaturaux comme celui de l’épouse de Gégé, une femme cruelle, infidèle et méprisante au point qu’on a un peu de mal à y croire. Depardieu fait du Depardieu, il promène sa carcasse tout le long du film en rendant service sur service, en se gavant de jus d’abricot, et en faisant démonstration d’une gentillesse naïve qui là encore, parfois, sonne un peu « too much ». Finalement, le personnage le plus réussi est celui de Barbara et Deneuve incarne parfaitement bien cette femme blessée, à la dérive, imprévisible et ingérable qui, malgré ses frasques, trouve grâce aux yeux de tous. C’est la détresse qui affleure dans chacun de actes, dans chacune de ses paroles (même quand elle est drôle) qui est touchante et fonctionne. Du coup, tout le village (et le spectateur) a envie de tout lui pardonner, alors qu’elle est vraiment irresponsable ! Le problème de « Bonne Pomme » ce n’est pas son casting ou sa réalisation dans imagination, c’est que, une fois de plus, le scénario d’une comédie française ne va nulle part et finit par retomber comme un soufflé sorti du four trop rapidement. On pose une situation intéressante, potentiellement source d’humour mais aussi d’autre chose, et on ne l’exploite pas vraiment : on laisse le scénario ronronner, les situations s’enchainent, elles se ressemblent, les rebondissements sont téléphonés
(le coup du raid qui tourne court et du type qui revient la queue entre les jambes)
et le film se cherche, se cherche et se cherche encore… Alors, on trouve une sorte de pirouette de fin, une pirouette un peu étrange, qui laisse sur une impression finale d’inachevé et presque… de gâchis. Preuve est faite qu’il ne suffit pas de mettre deux mastodontes à l’affiche pour faire un bon film, il faut leur donner autre chose à jouer qu’une comédie un peu paresseuse qu’on aura oubliée en quelques jours. Catherine Deneuve, Gérard Depardieu, le cinéma français et le public méritent mieux qu’une « Bonne Pomme ». Et je me demande, au final, qui est vraiment la « Bonne Pomme », Gégé ou le spectateur qui a payé sa place de cinéma ?