Les enfants a toujours été un sujet tenant particulièrement à coeur à Simon Lereng Wilmont. Lorsqu'il était étudiant, il avait réalisé "Above the ground, beneath the sky" centré sur un jeune égyptien rêvant de devenir acrobate dans un cirque. Le cinéaste explique :
"Dans l’univers des films documentaires, on ne s’intéresse pas assez aux enfants. En tant que cinéaste et en tant que père d’un garçon de 12 ans, je crois en la nécessité de produire des documentaires pour eux. C’est pourquoi il est important de produire des films qui ne se concentrent pas seulement sur des sujets pouvant les intéresser mais des films qui leur donnent des outils pour grandir et devenir des individus avec leur liberté de penser. La seule manière d’y arriver, c’est de faire des films avec une grande valeur artistique !"
C'est après que Simon Lereng Wilmont a convaincu sa productrice de créer une collection de documentaires autour et pour les enfants que Graine de Champion a pu voir le jour. Il s'agit d'une collection de six moyens métrages autour des enfants et du sport dont Chikara, Ruben et Nastya. En France, pour la sortie en salles, ces trois films sont regroupés sous le titre Graine de champion.
"La première fois que j’ai vu Ruben en compétition, il y avait à la fois de la frustration et des larmes de joie. Je voulais comprendre ce qui fait que l’on devient un champion, comment on arrive à gagner des compétitions difficiles et comment on peut continuer à avancer après une défaite. Et puis, une autre histoire a émergé, qui est devenue tout aussi importante. C’était l’histoire des sentiments naissants entre Ruben et Marie.
Mon film est une fenêtre ouverte sur une phase de transition dans la vie d’un jeune garçon. Le public suit le personnage à travers mon regard de réalisateur sans que je n’interfère. On saisit davantage les nuances quand on se garde de chercher à donner des explications. C’est pourquoi j’ai fait le choix de ne pas ajouter de voix-off ni de longs sous-titres explicatifs.
Je n’ai pas non plus essayé de diriger les enfants, car quand j’essayais de leur donner des indications concernant leur comportement, cela ne marchait pas. Par contre, quand je les laissais seuls, des choses vraiment intéressantes commençaient à se produire. J’ai passé pas mal de temps à traîner avec Ruben et Marie, à jouer avec eux. Les enfants n’ayant pas le même genre de filtres que les adultes, il faut savoir quand poser la caméra. C’est ce qui rend le travail avec eux si difficile, et en même temps si amusant…
En tant que cinéaste et en tant que père, je pense qu’il est bon de donner à voir aux enfants des choses moins simplistes que tout ce qui leur est habituellement proposé à la télévision. Je veux leur apprendre à voir le monde à travers d’autres prismes que le prisme américain dominant."
"La première fois que j’ai vu Nastya, j’ai tout de suite été impressionné par la beauté de ses mouvements. Elle exécutait ses exercices à la perfection mais transmettait aussi des émotions, bien plus que ses camarades. Puis j’ai rencontré Polina, sa petite soeur, et j’ai compris combien leur relation était pleine de tendresse, d’admiration, de complicité et de confiance. Ce quelque chose à la fois fragile et puissant dans leur relation a vraiment captivé mon attention. Non seulement elles sont belles, intelligentes et travaillent dur mais elles s’aiment, se respectent et se font confiance. C’est amusant, mais ce sont les discussions entre Nastya et Polina, sur ce pourquoi elles veulent danser, qui m’ont aidé à comprendre pourquoi il est si important pour moi de faire des films."
"L’idée du film m’est venue en voyant un reportage photo sur des clubs de sumo. J’ai trouvé cela vraiment fascinant. Normalement, ce sont des endroits très difficiles d’accès mais j’ai écrit à l’un de ces clubs qui a répondu positivement et était même très content que je vienne filmer. Dès que je suis arrivé, j’ai été frappé par Chikara, et j’ai tout de suite su que je venais de trouver mon personnage. Ses yeux sont comme le miroir de son âme. Avec ce film, au-delà du sport, je tenais à lutter contre les stéréotypes sur le Japon que nous avons en occident, et à montrer le regard qu’un enfant peut porter sur son père (et vice-versa). C’est pourquoi leur relation est au coeur de mon film."