The Square m'avait passablement énervé lors de mon premier visionnage à sa sortie, au cinéma. Quelques années plus tard, je le retrouve sur petit écran avec plus de mansuétude. Bien sûr, tout ce qui m'avait agacé dans un premier temps ne s'est pas évaporé. Le film est donneur de leçons et manque de subtilité. Avec son esthétique froide et glaçante, il montre au spectateur ce qu'il prétend dénoncer dans une sorte de mise en abyme plus pédante que modeste. Sa critique de l'art contemporain est lourde et déjà vue. Celle de l'homme contemporain, qui aborde de très, trop nombreux aspects, manque de complexité. Le réalisateur regarde son film comme un artiste narcissique regarderait son oeuvre d'art dans sa galerie fermée. En résumé, ce qui m'agace, c'est que le "The square" ne joue que sur la corde grinçante et sarcastique.
Néanmoins, le film est aussi loin de laisser indifférent. Il marque profondément car il touche juste et peint de manière originale notre société, notre époque et le modèle suédois, tant vanté à l'international. Il touche du doigt les contradictions de la bourgeoisie du XXIeme siècle, à travers des scènes tantôt agaçantes, mais aussi tantôt réjouissantes. Des scènes marquantes.
Evidemment, celle du vol dès le début du film, celle de la première visite dans une cité populaire, celle de la fête dans les appartements royaux, celle de l'enfant dans l'escalier, celle du buzz médiatique qui suit la présentation de la vidéo de promotion de l'exposition... Et bien sûr, cette incroyable scène de l'homme-singe pendant le dîner avec les mécènes, une scène d'une force impressionnante, indépendante, gênante au possible où le film atteint son meilleur, et où les hommes sont mis face à leur égoïsme et leur individualisme. Lorsque la jeune femme se fait attaquer, il faut attendre bien longtemps avant que les hommes, réduis à leur instinct barbare, ne finissent par se lever, en meute, pour frapper, comme un seul homme, celui qui est différent et ne se comporte pas comme les autres.
The square est donc aussi un film gênant, efficace, et à la mise en scène brillante.