Le petit monde recomposé par Les Baronnes ne fait pas grand sens et injecte dans l’année 1978 un féminisme qui n’est pas le sien. Un féminisme qui, privé de son ancrage historique, s’automatise, tourne à vide. On nous montre que les hommes sont des porcs et des tueurs, ils frappent les femmes et se saoulent sans arrêt, ce qui est mal, immoral, donc condamné par le film. Pourtant, qu’on abatte des gars en pleine rue, sous les yeux des familles qui passaient par là, ça va, pas de problème, pfut circulez. En fin de compte, Les Baronnes ne cesse de nous faire la morale en brossant grossièrement le portrait du martyre féminin en triptyque, alors qu’il n’est pas moral pour un sou. Et cette hypocrisie congénitale se retrouve dans la tonalité d’ensemble, incapable de choisir un registre et de s’y tenir ; mêler les tons requiert un talent dont le film est dépourvu, si bien que les séquences échouent à se suivre naturellement, tout paraît saccadé, haché, comme rapiécé à partir de supports hétérogènes. Il y a bien Melissa McCarthy qui sauve la mise. Mais c’est tout ce que nous retiendrons de cet ersatz des Veuves, long métrage signé Steve McQueen qui, en abordant une histoire similaire, parvenait à composer des personnages de femmes fortes et à rendre intelligente leur cause. Le féminisme mérite mieux que ces Baronnes qui provoquent pour répondre à la provocation (« avec toi, j’ai eu que trois orgasmes, et tac »), qui agressent pour essuyer l’agression, entretenant malgré elles ce cycle des violences qu’elles prétendaient dénoncer.