Franchement très agréablement surpris par ce Woody Allen dont je n'attendais pas grand chose étant donné les retours plutôt mitigés. Mais je dois dire que ça doit quasiment faire deux ans que je n'en avais pas vu et à sa sortie cela faisait facilement un an et demi qu'il n'avait pas sorti de film et quelque part ça me manquait. On était habitué à un rythme très soutenu, sept mois seulement séparaient ses deux films précédents : L'homme irrationnel et Cafe Society.
Il n'y a plus qu'à espérer qu'il pourra continuer à maintenir ce rythme malgré la ressortie de quelques vieilles affaires et la vieillesse qui le frappe inexorablement.
Bref, je suis très content de retrouver Woody Allen et cette fois avec un drame sur une fois dans sa quarantaine ce qui n'est pas sans rappeler Blue Jasmine, son film de 2013. Alors cette fois-ci c'est très différent et à mon goût beaucoup plus réussi que le film avec Cate Blanchett. En effet, visuellement le film est absolument sublime, les tons oranges et bleus donnent une impression de coucher de soleil permanent, mais surtout Storaro, le chef op', s'amuse à faire passer les scènes d'une couleur à une autre, du bleu au orange (voire rouge) et inversement, donnant ainsi aux scène une intensité nouvelle.
Outre la réussite au niveau de la lumière, même la mise en scène de Woody Allen semble renouvelée. L'histoire se passe quasiment dans un huis clos, un parc d'attraction à Coney Island, une maison à côté du parc, un restaurant dans le parc... Il maîtrise totalement son décor des années 50 et se permet de bouger la caméra, de passer d'un personnage à l'autre, de suivre l'action en passant d'une fenêtre à l'autre...
La vivacité nouvelle de la caméra et la lumière fluctuante correspondant bien aux sautes d'humeur de l'héroïne interprétée par Kate Winslet. Comme elle, la caméra passe d'une idée à l'autre, on gronde le fils pyromane puis on passe à la belle-fille qui a des vues qui le beau maître nageur...
Alors malheureusement c'est un peu prévisible. Dès qu'on voit Justin Timberlake on sait qu'il va se taper à la fois la mère et la fille. Dès le départ on nous dit que la fille est pourchassée par la mafia... On voit la jalousie de Kate Winslet grandir à vue d’œil, forcément ce qui doit arriver arrivera. Cependant, si d'habitude j'aime beaucoup l'aspect fataliste, le destin qui se met en marche, j'avoue avoir un peu de mal avec le classicisme de l'intrigue. Disons que l'on n'a rien de plus qu'une itération classique et sans grande inventivité narrative... et c'est dommage.
Alors vu que c'est Justin Timberlake le narrateur, que dans le film il étudie la tragédie, qu'il veut devenir romancier on peut juste se dire qu'il est mauvais écrivain... Mais ça ne colle pas. On s'est quand même tapé un film un peu convenu.
Il ne faut cependant pas se méprendre, le film est plaisant à suivre, c'est avec un grand plaisir que j'ai suivi ces personnages sublimé par la lumière de Storaro, mais bon, on pouvait, vu les excellents acteurs réunis ici, le directeur photo, le réalisateur, espérer quelque chose d'un peu moins convenu. Mais il n'en reste pas moins un film qui s'il ne fera sans doute pas date dans la filmographie de Woody Allen lui aura permet de s'amuser avec un décor somptueux et de donner un côté théâtral (dans le très bon sens du terme) à son film.