Pas de doute : Stephen Frears reste un réalisateur appliqué, apportant beaucoup de soin à ce qu'il filme, le résultat se regardant avec un certain plaisir, cette étonnante histoire vraie présentant un intérêt historique réel. C'est cohérent, bien mené, écrit avec soin et joliment emballé : du travail de qualité, assurément. Mais bon, vous devinez, évidemment, qu'il y a un hic dans tout ça. En fait, ce n'est même pas le film lui-même, c'est surtout qu'il soit réalisé par Frears. Tout le monde avait déjà remarqué que le réalisateur s'était beaucoup assagi ces dernières années, mais là, il s'est carrément shooté à la naphtaline. Lui, le réalisateur social, engagé, parlant des plus démunis, des minorités, des marginaux, voilà qu'il s'intéresse à... la Reine Victoria. Ce n'est pas un défaut en soi, nous sommes d'accord, mais difficile de se sentir totalement impliqué, d'autant que la monarque est ici montrée sous un jour particulièrement positif et bienveillant, alors que je crois savoir que c'était quand même un peu plus compliqué, beaucoup de violences ayant eu lieu sous son règne et probablement avec sa bénédiction. Maintenant, pourquoi pas, on passe un bon moment, interprété (évidemment) avec talent de toute part, la grand Judi Dench en tête : à ce titre, son monologue où elle explique son état d'esprit avec une force de caractère impressionnante est d'assez loin le meilleur moment du film. De la belle ouvrage, à défaut de regard critique : tout le monde vieillit, même Stephen Frears...