Deuxième spin-off du diptyque "Conjuring" (qui deviendra un triptyque prochainement puisque le numéro 3 est annoncé pour 2020), "La nonne" aurait pu être intéressant à bien des égards. Principalement parce que James Wan veille comme un père attentionné sur son œuvre originelle en participant à l’écriture du scénario et à la production. Seulement voilà : il confie la réalisation à Corin Hardy à la suite de "Le sanctuaire". Indéniablement, Hardy connait son job et maîtrise le cinéma à caractère horrifique car il connait les codes du genre. Seulement il y a un mais. Et le mais réside dans l’utilisation de ces codes : ils sont tous connus ! Si connus qu’ils sont usés, pour ne pas dire éculés. Pour être plus précis, on attend certains effets et… ils arrivent exactement comme on l’imaginait, comme cette bonne sœur qui tombe sous le nez du Père Burke. Du coup, l’histoire n’offre pas vraiment de surprises dignes de ce nom. On peut même dire qu’elle souffre d’une absence totale d’originalité. Totale ? Presque ! Disons qu’il faut attendre environ 1h20 pour voir quelque chose de relativement novateur, et encore cela ne dure que le temps d’un feu de paille. A cela on rajoute quelques maladresses, comme « allô » (par deux fois) qui m’a fait (presque) croire l’espace d’un instant que l'esprit de Nabilla rôdait dans les parages ! Cela dit, je n’imagine pas un seul instant des religieux utiliser cette expression si chère à cette personnalité qui a tant défrayé la chronique. Questions maladresses, on peut rajouter aussi le fait de voir débouler les religieuses dans la chapelle comme si c’était une armée en marche rangée vers un âpre combat et sacrément décidée à en découdre. Et puis la musique… ah la musique… Vous ne trouvez pas qu’il y a un thème qui fait penser à une musique de secte ? A une musique qui évoque des traditions anciennes de certaines civilisations, à savoir les sacrifices ? Rien d’étonnant, le morceau se nomme "Sacrifice". Bien qu’elle ne soit pas vraiment hors de propos si on se penche sur la trame explicative, je l’ai trouvée dérangeante ! Autre reproche qu’on pourrait faire, c’est dans le maniement de la caméra. La réalisation est certes relativement correcte, mais épouvantablement classique. On en vient à regretter que James Wan ait délégué ce poste. Mais là où le bât blesse le plus, c’est au niveau du casting. Ni Demian Bichir dans le rôle du Père Burke, ni Taissa Fermiga dans les traits de Sœur Irene ne font preuve du moindre charisme. On ne croit guère à leur personnage, et on ne ressent à aucun moment leurs peurs, y compris dans les moments les plus extrêmes. La palme du bouffon ridicule revient cependant au belge Jonas Bloquet en Don Juan invétéré qui se transforme en héros sauveur de dernière minute.
Même la vilaine nonne le qualifie d’idiot du village !
D’ailleurs, je ne sais pas vous mais je me demande pourquoi ce francophone belge a été transformé en francophone canadien… ( ???). En dépit de tous ces défauts, l’histoire ne parait pas si nulle que ça, sans qu’elle soit pour autant transcendantale. . Soyons honnêtes, on a vu bien pire, et… on a vu bien mieux. Mais je suis sûr que les nouveaux adeptes du genre y trouveront leur compte. Il n’empêche qu’on décèle en ce long métrage un beau potentiel, y compris dans le spectaculaire. Surtout si on tient compte des décors, délicieusement (affreusement, au sens figuré ?) austères. Malheureusement même à ce niveau-là, la mise en valeur de ces bâtiments du XIVème siècle n’est pas franchement au rendez-vous. Certes la décoration est des plus succinctes et des plus rustres comme on peut l’attendre d’un couvent
(surtout quand il est damné)
, mais à la limite, une plus grande exploitation des dédales offerts par les nombreuses salles, couloirs et passages aurait été la bienvenue. Après tout, dans un tout autre registre, Jean-Jacques Annaud avait réussi cet aspect avec brio avec « Le nom de la Rose »… En conclusion : moyen ! Aurait pu mieux faire !