Que quelque chose d’aussi étrange, littéralement hors du temps, puisse encore sortir en 2017 est, en quelque sorte, de rassurant : Il faut dire que JF Davy, son réalisateur, a lui-même eu un parcours complètement improbable : cinéaste plus ou moins affilié à la Nouvelle Vague à la fin des années 60, il s’engouffre ensuite dans ce qu’il perçoit, comme beaucoup d’autres, comme l’avenir du cinéma: l’érotisme et la pornographie. Surpris (toujours comme beaucoup d’autres) par l’arrivée de la VHS, il sombre ensuite dans des productions de plus en plus minables et désargentées, parce que c’est facile, que ça ne coûte rien et qu’il faut bien payer les factures. Sa société fait faillite, s’ensuit un trou de vingt ans durant lequel, grâce à des placements immobiliers avisés, Davy se constitue un bas-de-laine qui lui permet de refaire du cinéma : du cinéma de cul, bien sûr...mais aussi des films populaires autobiographiques (‘Les aiguilles rouges’) et de fougueux manifestes anar, à l’instar de ce ‘Vive la crise’ et ses joyeux drilles bousillés par le système qui réapprennent à prendre le plaisir là où il se trouve. Clairement, il y a du Mocky chez Davy : comme lui, il est capable de recruter des acteurs hautement recommandables et de tenir un discours valable sur la société...et en même temps, il s’obstine à considérer qu’un film n’a besoin ni de budget ni de plan de tournage, et n’hésite jamais à sortir une blague Carambar grivoise de derrière les fagots : avec ‘Vive la crise’, c’est bien de ça qu’il s’agit, et juste de ça : des sketches décousus, des personnages qui se croisent sans que ce soit plus logique que ça et finissent tous embarqués dans la même galère, une ambiance de colonie de vacances pour adultes, des dialogues et un script qu’il aurait sans doute fallu relire avant le tournage et une authentique dégaine de navet moulé à l’ancienne...et paradoxalement, de temps à autre, un gag qui fait mouche et un constat implacablement juste sur ce qu’il entend dénoncer. A mesure que des armées de consultants lisseront toujours plus les contenus afin que rien ne puisse choquer les spectateur ou contrarier les bailleurs de fonds, un jour où l’autre, le nanard franc-tireur retrouvera ses lettres de noblesse, c’est moi qui vous le dit.