Colombe Savignac et Pascal Ralite, qui ont scénarisé et réalisé Le Rire de ma mère, ont depuis longtemps écrit chacun de leur côté des histoires différentes, mais souvent autour des mêmes problématiques : la filiation, le couple, la place de chacun au sein d’un groupe ou d’une famille, le temps qui passe... Leur collaboration est née d’un événement douloureux qu'ils ont vécu et qui les ont poussé à réfléchir ensemble à cet épisode de leur vie commune. "Comment faire le deuil des gens qu’on aime ? Et plus précisément comment un enfant se construit à travers cette épreuve ?", confient-ils.
Colombe Savignac et Pascal Ralite expliquent pourquoi ils ont titré leur film Le Rire de ma mère : "Les enfants ont parfois honte de leurs parents. Ils trouvent gênant, par exemple, que leur père parle trop fort ou que leur mère ait un rire trop aigu. Mais curieusement, plus tard, lorsqu’ ils sont devenus grands, ce sont ces souvenirs là qui leur reviennent en mémoire, comme des petites madeleines, et ils les trimballent, comme des porte-bonheurs, pour le restant de leur vie. Le Rire de ma mère est l’expression de tout cela."
Le Rire de ma mère a été sélectionné dans les festivals suivants : Angoulême, Saint Jean de Luz, FIFF Namur, Tubingen et les Rencontres Cinématographiques de Cannes.
Colombe Savignac et Pascal Ralite ont fait du personnage de Gabrielle une artiste peintre pour que spectateur comprenne qu'il s'agit d'une femme secrète, discrète, sensible et parfois inadaptée au monde. "Comme la plupart des peintres, elle n’accepte personne dans son atelier. Et lorsque pour la première fois elle laisse entrer Adrien, c’est un grand pas qu’elle fait vers lui. On comprend alors qu’elle lui offre son affection et qu’il va désormais pouvoir compter sur elle. Cette scène, se révèle être clef pour l’avenir affectif d’Adrien", expliquent-ils.
Romain, le père d’Adrien, anime un vidéoclub. Colombe Savignac et Pascal Ralite voulaient trouver à ce personnage un métier qui témoigne de sa ténacité, de son dévouement, de sa capacité d’endurance et de son envie de retenir le temps qui passe. Les deux scénaristes/cinéastes racontent :
"Aujourd’hui, en ces temps d’invasion de la VOD, pour arriver à maintenir un vidéoclub ouvert, il faut être un peu nostalgique, pas mal organisé, très désintéressé, follement obstiné et éperdument passionné. Tout le Romain du film ! Et tant pis si ça paraît désuet. Nous assumons d’autant mieux ce choix que, jusqu’à sa fermeture nous fréquentions beaucoup le vidéoclub de notre quartier, et que nous continuons d’aller dans le seul de Paris qui est resté ouvert : Vidéosphère, le plus grand vidéoclub du monde à ce jour. (rires)"
Du côté des metteurs en scène qui les ont inspirés, Colombe Savignac et Pascal Ralite citent Claude Sautet, Maurice Pialat, Céline Sciamma ou encore le réalisateur turc Nuri Bilge Ceylan. Mais c'est plus particulièrement John Cassavetes, pour sa manière d’être près de ses personnages, notamment dans Opening Night, qui leur a servi de modèle. Ils confient :
"Cassavetes parvient à nous faire pénétrer dans l’intimité de ses personnages sans être pour autant voyeur. Cette manière très naturelle, qu’il avait d’accompagner ses comédiens, de capter avec sa caméra, leurs doutes et leurs blessures était extraordinaire. À l’écran, cela rendait ses personnages inoubliables. Sa femme Gena Rowlands est restée l’une de nos actrices fétiches, tout comme Romy Schneider."
C'est dans Laurence Anyways de Xavier Dolan que Colombe Savignac et Pascal Ralite ont découvert la comédienne Suzanne Clément. Cette dernière a accepté de jouer Marie dans Le Rire de ma mère parce que le scénario du film lui rappelait des choses de sa vie personnelle et possédait un ton un peu décalé lui faisant penser à Little Miss Sunshine et aux longs métrages de Wes Anderson. "Le rôle qu’on me proposait avait d’étranges correspondances avec ce que je suis, dans son extravagance, son volontarisme, son entêtement, son besoin de liberté. Marie, ce n’était pas moi, mais nous avions quelques affinités", se rappelle Clément.
Colombe Savignac et Pascal Ralite ont choisi de raconter cette histoire par le regard d'un enfant. Ils expliquent ce choix par leur intérêt pour les thématiques de l'enfance et la difficulté à grandir mais aussi parce que choisir un tel point de vue leur a permis de se détacher de ce qu'ils avaient vécu pour entrer dans la fiction. Mais ce ne sont pas les seules raisons comme Savignac et Ralite l'expliquent :
"C’était enfin une manière de rendre indirectement hommage à notre fils, Roman, qui a réussi à traverser et surmonter cette épreuve avec un cran assez exceptionnel. Roman nous a beaucoup étonnés. Quand il a su sa mère malade, il a fait preuve d’un courage fou et d’une maturité insoupçonnable jusque là. Malgré son chagrin, il s’est tourné tout de suite vers la vie. On a fini par comprendre que, pour lui, la mort n’avait pas la même signification que pour nous. Quand on a vu comment il avait affronté ce drame, comment, malgré cela, il avait réussi à grandir, on s’est dit qu’il y avait, là, quelque chose à raconter sur l’enfance et son étonnante vitalité. On a conçu notre film comme un hymne à la vie."