On sait pertinemment que certaines bandes annonces racontent le film, d’autres méprennent le spectateur en mal ou en bien, ou d’autres donnent des indications qui peuvent malheureusement en dire trop. Dès les premières minutes dans le bureau de la juge, séquence remarquable de réalisme, je n’ai pas cru au changement de mentalité d’Antoine. Certainement influencé par les extraits de la bande annonce. A cela s’ajoutent des extraits avant et après les Césars. Pourtant, je me réservais le bénéfice de la surprise, du contre-pied. Je le dis d’emblée, je n’ai pas été pour autant déçu. Le récit me maintient dans le doute. C’est tant mieux. Un doute de méfiance toute de même. Oui, peu importe, je ressens la tension et cette tension est saine car elle me permet de rentrer dans le film, de contrôler aussi difficilement ma respiration que Julien quand il rejoint son père ; « l’autre » qu’il ne veut pas voir. Julien, petit bonhomme qui a le cran d’affronter sa peur que lui inspire son père, masse corpulente dont on perçoit une violence fragile, entendez une violence prête à exploser, une violence latente, en filigrane. Un petit bonhomme qui ose affronter son père par de petites réflexions tranchantes et désobligeantes. Sa résignation est de l’ordre du sacrifice ; oui, il se sacrifie pour sauver ou préserver sa mère. Ça par contre, la bande annonce ne me le dit pas. Et c’est tant mieux. Thomas Giora est remarquable. Ses silences, ses regards, sa peur sont poignants. J’ai peur pour lui à chaque instant. Il a amplement mérité sa nomination aux Césars comme avant lui Haley Joel Osment pour le « Sixième sens » aux Oscar. Denis Ménochet incarne un Antoine fragile et aux abois qu’on ne devine pas tant que ça. Une grenade à retardement sommeille en lui. Léa Drucker interprète une Miriam discrète car Xavier Legrand nous la montre peu, et le peu qu’on voit, elle me paraît plus solide qu’Antoine. On se doute bien que ça va exploser mais j’avoue que je ne m’attendais pas à un final grandiose. Et la bande annonce ne me l’a pas dit, c’est tant mieux ! Xavier Legrand nous offre une forte intensité qui passent par des sons extérieurs. Dans l’appartement de Miriam, on y entend la sonnerie de l’interphone que l’on devine manipulée par un Antoine hystérique. Puis, plus rien. Julien dans le lit avec sa mère. La tension est là, palpable, irrespirable. Puis les bruits sourds d’un ascenseur dans le couloir de l’immeuble, bruits qui contrastent avec le silence de la nuit. Miriam se redresse et comprend. S’ensuit une violence inouïe. Cette violence de tous les jours me perturbe plus que celle illustrée dans « Punisher ». Je n’en rajoute pas. Il faut voir le film. Il y a dans la mise en scène de ce fait divers tous les contours d’un thriller voire d’un film d’épouvante.
La scène dans la salle de bain m’a complètement retourné parce qu’elle est justement épouvantable !
Et ça aussi la bande annonce ne m’a rien dit. Et c’est tant mieux. A voir, vraiment.