''Bon... allez, j'y vais...'' Sans enthousiasme, c'est ainsi que je me suis décidé à aller voir ce film...
Je travaille chez Disney depuis longtemps et je connais la vision de la marque, et sans aller dans les détails, toute le monde le constate et le sait : il s'agit pour l'essentiel de surfer sur les classiques animés tant aimés pour faire des films sans risque, qui rapporteront assurément suffisamment de revenus grâce à leurs notoriétés. Depuis une quinzaine d'années, on observe chez Disney une sorte de croyance insupportable qui consiste à considérer l'animation comme inférieure aux film ''réels'' dits 'live action'. Paradoxe absolu pour la marque au grandes oreilles, autrefois au sommet du dessin animé.
Donc, sans surprise, c'est très mauvais.
Sans même évoquer les postulats soit-disant progressistes assumés de Disney et la couleur de peau d'Ariel, la Petite Sirène, et tous les derniers live-action sont des navets lénifiants, consensuels, sans émotions et sans saveur.
Pour commencer, Ariel n'a plus aucune fragilité, ni aspérité. Puisque le public est incapable de faire la différence entre un conte et le monde réel il faut retirer toutes soit-disantes ambiguïtés sur la notion de consentement de la sirène, et éviter qu'un homme ne lui paraisse 'supérieur' , les chansons 'pauvres âmes en perditions' et 'embrasse la' ont été modifiées pour ne pas heurter leurs sensibilités... merci.
Et pour être vraiment certain qu'Ariel soit bien d'accord pour se faire embrasser, dans cette version:
Ursula ira même jusqu'à retirer la mémoire d'Ariel pour que le baiser qui romprait le contrat ne soit pas donner par nécessité, (et donc par contrainte) mais bien parce qu'elle tombe véritablement amoureuse du prince.... Insupportable. Par conséquence, le film bien trop longtemps, puisqu'il faut qu'Ariel tombe laborieusement amoureuse d'un Eric sans grand intérêt...
Coté images de synthèse, on découvre avec effroi des CGI de playstation 2 ; comme le crabe Sebastien ou le pauvre poisson Polochon, affreux, ou encore les cheveux des sirènes qui ondulent grosièrement, on faisait mieux dans les années 60. On ne croit pas une seconde que les acteurs sont immergés, tout semble hyper faux (il aurait au moins pu s'inspirer d'Avatar sur ce point, c'est la même boite en plus...).
Dans la première partie du film, qui se passe sous l'eau, tout est noir et sombre, (et c'est bien pratique, comme ça, on peut cacher la misère des effets spéciaux très médiocres), il n'y a pas de texture dans l'eau, pas de bulle, rien.
La cité des sirènes est peu exploitée visuellement; les autres sirènes sont inexistantes et la encore, niveau filiation; les soeurs d'Ariel constituent la famille la moins crédible de l'océan. (Et que vient faire ce pauvre Javier Barden (déguisé en Aquaman version wish), dans ce naufrage !?)
Sur terre, c'est un peu mieux, on est loin du décors nord européen d'Andersen, mais allez, c'est plus joli que sous l'eau et disons que c'est déjà ça...
La musique, élément central du film ne parvient pas a relever le niveau; encombrée de vibrato insipides pour bien nous montrer que c'est des vrais chanteurs de talent... beurk.
Et bien entendu, la scène avec le cuisinier qui poursuit Sebastian a été retirée, car ça n'est pas 'vegan friendly'... À ce stade, j'ai envie de pleurer...
Un tel ratage pour adapter une si belle histoire... Quel gâchis. C'était pourtant l'occasion de revenir à la source du conte, de dévoiler la véritable histoire de la Petite sirène, de faire un film noir, un petit chef d'oeuvre inattendu, de viser une autre cible que les enfants qui ne méritent même pas une telle purge... N'allez pas le voir, ni Pinochio, ni Peter Pan, ni Blanche Neige et les 7 petites créatures magiques qui ne sont pas des nains....
Je laisse donc mes filles admirer le remarquable travail qui a été fait en 1989, leurs évitant ainsi de s'abîmer les yeux (et les oreilles) devant une telle déception.