Un film intéressant et même passionnant et qui pêche probablement par son ambition. Il se situe sur deux niveaux: un niveau géopolitique; et l'analyse psychologique d'un homme. Il glisse perpétuellement d'un niveau sur l'autre, et pas toujours très adroitement. Le jeune Santiago Mitre, peut être, n'a pas encore suffisamment de métier pour maîtriser une mise en scène aussi subtile?
Niveau géopolitique: il s'agit de l'interventionnisme des Etats Unis dans les affaires de l'Amérique latine, dont l'histoire récente nous a fourni de nombreux exemples, parfois dramatiques. Ici, un sommet réunit les chefs de gouvernement de l'ensemble du sous continent, pour décider de la formation d'un cartel pétrolier. Evidemment, les US veulent en être! Des affaires importantes ne sauraient se traiter sans leur aval... Pour cela, ils ont un cheval de Troie, le dynamique président mexicain Sastre (Daniel Giménez Cacho); et contre eux, le puissant président brésilien Prette (Leonardo Franco), aux mimiques mussoliniennes, à qui peu osent s'opposer.
Le président de l'Argentine, Hernan Bianco, vient d'être élu (c'est le charismatiquissime Ricardo Darin...). Sa campagne, il l'a faite sur son nom: Bianco. Intègre, blanc comme neige. C'est un homme comme nous, de modeste extraction, un homme de la rue, qui sera un président normal (on pense à quelqu'un et on se marre.....). Et déjà, ses opposants l'accusent d'être transparent; on ne sait pas ce qu'il pense; il ne fait rien (on re-pense à re-quelqu'un et on se re-marre....). Son team l'exhorte à réussir ce sommet (et à ne pas se contenter de suivre le Brésil comme d'habitude), organisé par la présidente du Chili (Paulina Garcia) dans le palace d'un ski-resort, un endroit inouï à 3000m d'altitude, dans un paysage hallucinant de hauts sommets à perte de vue, dont on aurait du mal à imaginer l'équivalent dans nos Alpes, un havre de raffinement perdu dans la sauvagerie
Pourtant Hernan a un talon d'Achille: sa fille, Marina (Dolores Fonzi). Enfant, elle a eu des crises de violence. Puis elle s'est mariée, a eu des enfants, s'est séparé de son mari, affairiste et drogué. Dans quelle mesure Hernan a t-il poussé à la séparation? Rien ne le dit dans le film -de toutes façons, rien n'est dit dans le film!- mais le spectateur se pose la question car Marina revoit son ex et, manifestement, l'aime encore.... Quand le film commence, à la toute première scène, l'ex en question menace de porter plainte contre le Président pour des faits de corruption qu'il connaîtrait. Celui ci fait venir Marina, qui réagit par une nouvelle crise de violence. Au cours de séances d'hypnose, censées la normaliser, elle voit d'étranges scènes, un incendie, un enfant.... toutes choses qui n'ont pas eu lieu, mais dans ce cas pourquoi Hernan met il un terme aux séances d'hypnose?
Alors que le Président est invité, pour ne pas dire sommé, à une rencontre secrète avec le secrétaire d'Etat américain, parce que les US se disent qu'un homme si transparent doit être facile à manipuler, voire à acheter, nous autres spectateurs, nous demandons toujours: qui est réellement Hernan?
Il y a des pépites dans le cinéma argentin, et pas seulement Carlos Sorin! (je ne me suis jamais remise de Bombo el perro et j'attends toujours qu'il passe à la télévision...). En dépit de ses défauts, de son caractère par trop hétéroclite voire confus, El Presidente est une pépite! Cela dit, il doit beaucoup à Ricardo Darin, un des acteurs les plus fascinants de notre temps...