Chaque année, une petite pépite est présentée au festival de Cannes et chaque année, elle repart bredouille, renforçant sans cesse l'incompréhension régnant entre le spectateur et le jury. Qu'importe, il ne fait aucun doute qu'"Under the Silver Lake" atteindra une aura culte au fil des années tant le troisième film de David Robert Mitchell vient décortiquer le fantasme et le fétichisme hollywoodien avec un regard particulier, filmant les errances de son personnage comme un rêve éveillé. A Los Angeles, Sam, la trentaine, une dégaine d'adolescent (Andrew Garfield, jamais aussi bon que lorsqu'il embrasse un rôle avec une part d'ombre) ne fait rien de ses journées si ce n'est épier ses voisines. Lorsque Sarah, l'une d'entre elle, disparaît sans laisser de traces, il décide de la retrouver, se perdant alors dans une Los Angeles labyrinthique où il découvre l'existence de symboles cachés, de messages camouflés dans les chansons et de mythes inquiétants. Visiblement plus occupé à retrouver la belle Sarah qu'à payer son loyer en retard, Sam s'engage sur des chemins étranges... Après avoir été largement remarqué avec "It Follows" qui devait beaucoup à John Carpenter, David Robert Mitchell peut cette fois-ci remercier David Lynch, le réalisateur de "Mulholland Drive" étant vraisemblablement une immense influence d'"Under the Silver Lake", partageant avec lui son goût du mystère et des images étranges. Mais Robert Mitchell, non content de citer également Hitchcock ou De Palma, parvient néanmoins à rendre personnel ce récit d'une errance dans lequel un personnage se perd dans les méandres de la pop-culture en y cherchant absolument une signification. Certes, on pourra reprocher au film d'essayer de brasser trop large et de s'égarer un peu dans quelques scènes, semblant vouloir trop en montrer, trop en raconter. Cela n'empêche en rien "Under the Silver Lake" d'être une œuvre particulièrement hypnotique et fascinante, posant un regard aussi décalé que lucide sur les effets pervers de l'usine à rêves et la façon dont elle joue sur l'imaginaire des gens, emplissant leur cerveau de mythes et d'images à laquelle ils cherchent un sens. Parce qu'il faut bien que tout ait un sens, non ? C'est en tout cas à cette interrogation que David Robert Mitchell répond plus ou moins évasivement en multipliant les jeux de piste ludiques, s'y perdant un peu, mais se montrant résolument généreux et ambitieux, achevant de faire de son troisième long-métrage un film en passe de devenir culte.