Assez méconnue en terres francophones, ‘Cats’ est au contraire une véritable institution dans les pays anglo-saxons, au point qu’elle est devenue la comédie musicale la plus jouée à Broadway avec plus de 6000 représentations depuis sa Première en 1982, ce qui n’est franchement pas mal pour un truc moitié synth-pop, moitié AOR golio, avec des artistes déguisés et grimés en chat. Pour moi, qui ne suis ni anglophone, ni amateur de comédie musicale, un tel succès est à peu près aussi incompréhensible que celui, tout aussi persistant, du ‘Rocky horror picture show’, même si j’ai bien dû concéder que quelques titres, dont le déchirant ‘Memory’, ne m'étaient pas inconnus. Sur le fond, je ne crois pas qu’il était vraiment possible de se louper sur un ensemble de petites histoires traitant de la mythologie des chats de gouttière londoniens : c’est kitsch, clinquant, dégoulinant de paillettes et de couleurs fluo et donc en tout point conforme aux codes qui régissent les adaptations de comédies musicales au cinéma, sans compter que Tom Hooper avait déjà pu se faire la main sur ‘Les Misérables’ voici quelques années. En revanche, à en croire les critiques à sa sortie, ‘Cats’ s’est bien viandé sur le visuel : on a beaucoup conspué le résultat pour ses effets spéciaux inaboutis, et parfois franchement loupés. De fait, les couacs numériques sont nombreux et visibles à l’oeil nu, donc problématiques dans le cadre d’une production de cette importance,...mais ce n’est pas réellement ce manque de finition qui m’a choqué. C’est juste que...il y a des choses qui ne devraient pas exister à l’écran, c’est tout. Je peux tolérer beaucoup de choses, le gore qui tache, les pratiques sexuelles déviantes, les blagues sur les handicapés...mais les animaux anthropomorphes numériques sexués, ça me met vraiment très mal à l’aise. J’ai un problème avec Rebel Wilson ou Idriss Elba qui écartent les cuisses (enfin, les pattes) alors qu’ils sont probablement nus sous leur fourrure numérique. Quant à avoir trouvé que Taylor Swift, en interprétant ‘Macavity : The mystery cat’, dégageait une certaine séduction, malgré ses moustaches et ses oreilles pointues, je me sens juste sale d’avoir ressenti ça. Désormais, j’ai l’impression que des Furries me suivent du regard dans la rue, parce qu’ils savent. En dehors de ce problème de positionnement sociologique personnel, ‘Cats’, dont les chansons m’ont laissé indifférent et dont la facture technique laisse à désirer, m’a à la fois consterné et fasciné par son formidable mauvais goût. Je n’aurais vraiment pas dû perdre deux heures de mon temps à regarder ça...mais d’un autre côté, j’aurais vraiment trouvé injuste qu’une monstruosité pareille ne puisse pas exister.