On avait laissé Michel Hazanavicius en 2014 sur le drame de guerre "The Search", film pavé de bonnes intentions qui se perdait dans les bons sentiments. On le retrouve cette fois en grande forme, plus cinéphile que jamais, s'attaquant au plus sacré des cinéastes : Jean-Luc Godard. Avec une admiration certaine pour le cinéaste, Hazanavicius brosse pourtant un portrait peu flatteur, se concentrant sur l'année 1968 où, juste après la sortie de "La chinoise" éreinté par la critique, Godard entreprend de faire sa révolution en même temps que le mois de mai. Le cinéaste, formidablement interprété par un Louis Garrel méconnaissable et irrésistible, y est montré comme un type sacrément intelligent et drôle se fourvoyant totalement dans sa révolution, devenant un monstre d'égoïsme ne pensant plus qu'à lui, rejetant les autres, notamment sa femme Anne Wiazemsky. Michel Hazanavicius désacralise donc Godard pour le montrer comme tout le monde, avec ses faiblesses, ses doutes et ses agacements, surtout quand on lui demande quand est-ce qu'il commencera à refaire des films marrants. Certes, Godard est désacralisé mais paradoxalement, Hazanavicius lui rend tout de même un sacré bel hommage. Toute la mise en scène du film respire le Godard : le choix des cadrages, des couleurs, des références placées çà et là, des idées reprises aux films de JLG pour mieux illustrer la révolution qu'il entreprend au détriment de sa femme, incarnée ici par Stacy Martin, la révélation de "Nymphomaniac". Écrit avec intelligence, réalisé avec panache, humour et même tendresse, "Le Redoutable" est une jolie déclaration d'amour au cinéma et notamment à celui de Godard, le tout sous le couvert du pastiche très classe, genre qui va décidément très bien à Michel Hazanavicius.