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Yves G.
1 527 abonnés
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3,5
Publiée le 1 mars 2017
Jéro Yun est un jeune réalisateur sud-coréen venu étudier en France. Après avoir réalisé en 2011 un court-métrage sur une Nord-Coréenne, émigrée en France, hantée par la séparation de ses enfants, il approfondit ce sillon à travers le personnage éminemment romanesque de « Madame B. »
Quand la réalité dépasse la fiction. On a lu des témoignages sur les terribles conditions de vie qui poussent les Nord-Coréens à quitter leur pays. Mais on en a peu vu les effets, étant donné l’impossibilité d’aller les filmer à l’intérieur même de ce pays. Le court documentaire (une heure onze seulement) de Jéro Yun permet d’en prendre conscience.
Ce qui frappe, c’est la terrible dureté de ces personnages dont le comportement ne laisse rien deviner des tourments qui les assaillent. A ce titre, la photo qui orne l’affiche est particulièrement bien choisie. Cette photo ne recherche aucun effet esthétique. Juste le gros plan d’un visage déterminé capté sur le vif en plein mouvement.
Madame B est une survivante. Elle quitte un mari et deux enfants en Corée du Nord pour aller passer quelques semaines en Chine et s’y enrichir. Mais elle est vendue par son passeur à une famille de paysans pauvres. Oubliée une légitime révolte, elle s’attache à son nouveau mari et à ses beaux-parents. Elle utilise sa connaissance des réseaux pour participer à des réseaux. Drogue, êtres humains, proxénétisme : elle confesse, sans scrupule, face caméra, les trafics auxquels elle a participé. Mais elle souffre d’être séparée de ses enfants. Elle réussit à les faire passer l’un après l’autre en Corée du sud. Elle-même décide d’y aller via la Thaïlande où le documentariste la suit au cours d’un épuisant périple.
Le documentaire pourrait s’arrêter là. Mais c’est oublier la paranoïa des services secrets qui redoutent, à tort ou à raison, l’infiltration d’agents nord-coréens. Loin d’accueillir Madame B à bras ouverts, ils vont la soumettre pendant de longues années à une période probatoire. Du coup, Madame B, qui aurait souhaité faire venir son mari chinois, se retrouve contrainte à revivre avec son ancien mari nord-coréen – qui a entretemps quitté la Corée du Nord.
La situation de Madame B est si absurde qu’elle en devient cocasse. Elle est écartelée entre trois foyers : la Corée du Nord, la Chine, la Corée du Sud. A travers le portrait de cette femme courageuse, Jéro Yun nous fait toucher du doigt la situation déchirante de tout un peuple.
On pense longtemps que le principal (et peut-être le seul) intérêt de ce court film documentaire réside dans le tableau saisissant qu'il dresse du chemin qui mène de la Corée du Nord à la Corée du Sud en passant par la Chine puis par la Thaïlande.
Un peu déçu de ne pas en apprendre plus sur la vie en Corée du Nord, on suit d'un oeil distrait les errements de cette femme, qui a fui la dictature, trafiqué de la drogue en Chine, a été vendue à un mari, puis finalement retrouvé ses fils et son ex-mari à Séoul.
Le film est hétéroclite, et semble hésiter entre plusieurs registres sans en choisir vraiment un : scènes sur le vif filmées caméra à l'épaule, tableau silencieux de la pauvreté à la Wang Bing ou interviews des protagonistes face caméra. Il manque à Madame B. une cohérence générale, ce qui découle peut-être des difficiles conditions de tournage.
Notre curiosité est de nouveau émoustillée dans la toute dernière partie, quand le film se transforme brutalement en suspense psychologique : quel mari (et quel pays) choisira finalement Madame B. ? Jero Yun ne nous donne pas la réponse, ce qui ajoute un peu à la frustration que procure globalement ce documentaire imparfait, qui traite d'un sujet intéressant.
Sans mise en contexte, sans fil conducteur, ce documentaire (à moins que ce ne soit une fiction?) n'apprend strictement rien. Le sujet est pourtant particulièrement riche. Madame B. a fui le régime dictatorial de Corée du Nord (comment ? On ne sait pas) et devient passeur dans un petit village chinois frontalier (par quel moyen ? On ne sait pas). Elle organise une fuite par la Thaïlande (Pourquoi ? On ne sait pas) et fait en sorte que sa famille la rejoigne. La pédagogie n'est pas une option pour ce type de film.
Magistral et d'actualité. L'itinéraire romanesque d'une forte en gueule fuyant la Corée du Nord pour La Corée du Sud. Derrière l'aventure, puissante et suivie caméra à l'épaule, c'est un témoignage profond sur l'absurdité des frontières, des antagonismes fabriqués, des idéologies de la peur... Jero Yun montre brillamment, sans manichéisme, que rien n'est noir ni blanc, et que dans les plus sombres situations demeure une lumière : l'humanité. Encore merci et bravo pour ce film.
Ce documentaire démarre dans le vif de l’action : Madame B est en train de faire passer en Chine une nord-coréenne. Tout de suite le spectateur est embarqué lui aussi, les plans sont rapides, heurtés. On perçoit la dureté, les risques, la peur de se faire repérer. L’intelligence de la prise de vue se manifeste par le choix, à certains moments très brefs, d’images confuses, comme des éclats, des ruptures. L’éclatement de la vie de Madame B, nord-coréenne, vendue par des passeurs à un paysan chinois pauvre, est montrée avec force par des ellipses et l’alternance entre trois moments - sa vie familiale en Chine, son périple pour atteindre la Corée du Sud, et moments de sa vie en Corée du sud avec ses fils et son mari. Jiro Yun réussit bien à faire passer par des gros plans floutés et des gros plans nets le lien entre la belle-mère chinoise et sa belle-fille. Le regard de la belle-mère chinoise en dit long sur le lien entre elles. Solidarité entre femmes, lutte pour la liberté. Les échanges entre madame B et les siens sont le plus souvent saisis sur le vif, attrapés au moment de diverses discussions : avec son mari chinois, avec sa famille chinoise, avec ses enfants en Corée du sud quand elle les a rejoints.
Le portrait de Madame B est sans concession, aux questions posées hors-champ par Jiro Yun elle répond qu’elle vit de divers trafics dont la vente de jeunes femmes pour les Karaoké. Mais elle est aussi victime. Elle retrouve ses enfants mais au prix de la séparation de ce mari chinois à qui elle s’est attachée. La complexité de sa situation nous donne à penser la situation chaotique engendrée par la coupure entre la Corée du nord et celle du sud et le poids de la misère.
Ce documentaire magnifique nous fait bouger, au fond, sur nos questions essentielles : la famille, l'amour, l'argent, la liberté. Madame B est admirable. A l'image, peut être, des migrants que nous voyons chaque jour dans les médias, dans nos rues, en bordure des routes. Poignant.
Jéro Yun rencontre et décide de suivre le périple d’une femme nord-coréenne qui immigre en Chine avant d’aller en Corée du Sud. Il évite l’écueil du manichéisme en ne s’intéressant qu’à la situation de cette femme sans aborder de front les divergences politiques entre les deux Corées, communiste au nord, capitaliste au sud (elles sont là, mais de manière diffuse, à travers quelques plans discrets, sans commentaire, et à travers le vécu de Madame B). Ce portrait de femme est saisissant tant elle affronte dignement les situations cruelles et révoltantes qu’elle traverse.
Si la Corée du Nord est très médiatisée de par son régime autoritaire, peu s'intéressent vraiment au sort de son peuple et surtout de ceux qui s'en échappent. Madame B est un documentaire qui nous permet d'avoir des clefs de compréhension sur un sujet trop oublié. Mais plus qu'un simple documentaire sur les réfugiés nord-coréens, Madame B est un portrait poignant de femme. Ayant fui son pays natal et cherchant à rejoindre son mari et ses fils à Séoul, c'est pourtant auprès de la famille chinoise à laquelle elle a été vendue qu'elle trouve le plus de réconfort. Trafiquante, un peu maquerelle mais aussi une mère aimante perdue entre plusieurs identités, Madame B étonne par la complexité de son personnage principal. En bref, un film singulier qui humanise des migrants invisibles, et qui nous fait apprécier un personnage très romanesque !
C’est en tournant son documentaire précédent, "Looking for North Koreans", que le réalisateur sud-coréen Jero Yun a rencontré Madame B et c’est son histoire qu’il raconte dans "Madame B, histoire d’une nord-coréenne". Une histoire très compliquée, cette femme, mariée et mère de famille en Corée du Nord, se retrouvant vendue à un paysan chinois par les passeurs à qui elle avait fait appel pour passer de Corée du Nord en Chine. La voilà donc avec un mari chinois, un mari officieux car l’absence de papiers l’empêche de se marier officiellement, la voilà rejoignant la Corée du Sud en transitant par la Thaïlande, devenant elle-même trafiquante, hésitant entre la Corée et la Chine. C’est donc très compliqué mais on finit par s’attacher à cette femme énergique et on se précipite sur son atlas pour bien situer tous les pays du Sud-Est asiatique que ce film nous fait visiter.