D'abord, c'est un série d'images animées ou statiques, toutes magnifiques, dont le filtre donne l'impression d'une lumière qui jaillit des murs et des visages. Pourtant, ces lieux n'ont rien de poétique. Il s'agit des décombres abandonnés de Tchernobyl, des immeubles immenses et nus, des couloirs désertés d'hôpital ou de palais soviétiques, et des maisons dépouillées et malheureuses. Des acteurs lisent un texte issu d'un livre témoignage. La parole est quasi durassienne tant le style est noble, posé et généreux. On croit relire son ouvrage "La Douleur" qui racontait le retour de son mari après les camps de la mort. Sauf que là, il s'agit d'un mari malade, qui se déforme par les irradiations. Cet exemple est l'un parmi tous les autres cités : des enfants, des vieillards, des parents. Tous accusent le silence de l'administration, la complicité des autorités. Il faut une aussi grande beauté pour dire l'indignité de ces vies effondrées par un réacteur nucléaire. "La supplication", au titre si évocateur, est une œuvre sublime, dense, et sobre, qui pourrait être qualifiée d'utilité publique. Même le cadreur confie son désarroi en regardant avec sa caméra ce monde où, magie du cinéma, il parvient à extraire du Beau. Beaucoup de réalisateurs se sont essayés à rendre hommage à ce drame technologique et social. Peu y sont parvenus. Indéniablement, cette "Supplication" est une profonde réussite.