Présenté dans la sélection Un Certain Regard lors du dernier Festival de Cannes, Personal Affairs est le premier long métrage de Maha Haj, réalisatrice palestinienne au passeport israélien. Maha est en effet originaire de Nazareth, comme la famille dont son film nous fait le portrait, et Nazareth est une ville pleinement israélienne, quand bien même la quasi totalité de la population est arabe. Dans la famille dépeinte par Maha Haj, on demande le père, Saleh, et la mère, Nabila. Ils habitent à Nazareth et les communications entre eux sont réduites au strict minimum, genre un « passe moi le sel », première réplique du film, lancée par Saleh à Nabila alors qu’il n’a qu’à tendre le bras pour atteindre la salière. En fait, Saleh passe son temps à lire des pages Wikipedia sur Internet alors que Nabila tricote, cuisine et regarde les premières minutes de séries télévisées devant lesquelles, régulièrement, elle s’endort. Leurs 3 enfants ont choisi d’aller s’établir ailleurs, Hicham en Suède, Tarek et Samar à Ramallah. Hicham, qui correspond via Skype avec ses parents, aimerait que ces derniers viennent lui rendre visite dans son nouveau pays. Samar, toute proche d’accoucher, est mariée avec George, un garagiste dont la mère, qui vit avec le couple, est à la fois sénile et diabétique. Quant à Tarek, il est plus ou moins metteur en scène et une relation professionnelle et plus ou moins amoureuse le lie à Maïssa, la meilleure amie de Samar. Tourné avec très peu de mouvements de caméra, le plus souvent en plans séquence, Personal affairs est un film regorgeant d’un humour très fin et qui présente tout à la fois un volet universel et un volet lié à la situation des palestiniens en Israël. Le volet universel, c’est l’incommunicabilité 2.0, celle qui se vit au travers d’internet, de Skype, des réseaux sociaux et des séries télévisées. Quant au volet israélien, ce sont les difficultés que rencontrent les palestiniens dans leur vie de tous les jours, les fameux checkpoints ou le fait pour un trentenaire de ne jamais avoir vu la mer, pourtant située à seulement 60 km, tout simplement parce qu’il a toujours habité à Ramallah, une ville située en zone A, avec toutes les difficultés que cela représente pour aller voir ailleurs. On ne sera pas surpris d’apprendre que Maha Haj a commencé sa carrière cinématographique auprès du réalisateur palestinien Elia Suleiman, souvent comparé à Jacques Tati, en tant que décoratrice sur "Le temps qu’il reste".