Je n’ai jamais eu le courage d’écrire une critique de film. Toutefois après avoir vu Ghostland, je me jette à l’eau pour partager mes sentiments et mes émotions avec vous.
Après Saint-Ange et son étrange orphelinat, Martyrs et sa société secrète, The Secret et sa ville minière fantomatique, Pascal Laugier, réalisateur français, signe son 4ème long-métrage Franco-Canadien : Ghostland. Mais avant tout propos, pourquoi allons-nous voir des films d’horreurs ? Se défier soi-même, se faire peur, savoir que l’on survivra face à cette expérience ? Ghostland va au-delà du genre d’épouvante.
Ghostland raconte l’histoire d’une mère et de ses deux filles, Beth et Vera, qui emménagent dans une vieille et terrifiante maison, remplie d’une infinité de poupées. Auparavant, cette maison appartenait à leur tante. Dès le premier soir, deux meurtriers pénètrent dans la maison et vont s’en prendre violemment aux trois personnages féminins. Battues, torturées, violées, les trois femmes finiront par sortir de ce cauchemar mais en garderont des séquelles à vie. Ce drame finira par affecter différemment chacune des jeunes filles dont les personnalités vont évoluer de manière différente suite à cette expérience épouvantable. Voilà, le film peut enfin commencer !
Le casting est bon, voire même très bon. Nous avons d’abord Mylène Farmer en tant que personnage secondaire jouant le rôle de la mère. Les deux ados jouent brillamment, s’impliquant dans leur rôle au point d’être victime d’un accident sur le lieu du tournage (l’actrice Taylor Hickson eut 70 points de suture et porta plainte contre la société de production).
Ghostland nous plonge dès le début du film dans une atmosphère poignante et malsaine. Le réalisateur, Pascal Laugier, a voulu centrer son film autour du thème des poupées. Mais pas n’importe quelles poupées ! Rien à voir avec celles James Wan (Réal. d’Annabelle) qui sont victimes d’une malédiction incompréhensible et irréaliste. Les poupées de Pascal Laugier sont différentes, elles sont poétiques, glaçantes, reflétant ainsi l’âme des héroïnes. Les poupées sont des jouets fragiles tout comme ces deux adolescentes, cassées par la brutalité et le sadisme de leurs bourreaux. L’affiche du film l’illustre très bien avec l’image de Beth (la jeune fille que l’on peut voir sur l’affiche) brisée par la cruauté de ses agresseurs.
Dès le début du film, Pascal Laugier installe une situation, des personnages et un contexte, jusqu’à un point précis du film que j’intitulerai le « Turn Over ». A partir de ce moment précis de l’histoire les cartes sont rebattues, le film bascule. Mais il ne faut pas confondre avec le Twist qui est un retournement final, une fin inattendue qui amène le spectateur à voir l’histoire sous un angle différent et qui le pousse vers une nouvelle interprétation de l’ensemble du film mais sans changer le propos. (ex : Shutter Island, 6ème sens…). En revanche, un Turn Over peut tout simplement consister à changer le propos ainsi que le point de vue de l’histoire. Le Twist veut agir comme une surprise alors que le Turn Over veut révéler une nouvelle histoire. C’est le cas dans Ghostland, qui se découpe en deux parties. Une première partie violente composée de Jump Scare efficaces et puissants. Les Jump Scare pourraient être perçus comme grossiers pour certaines personnes mais c’est d’abord un outil qui doit être utilisé au bon moment. La deuxième partie du film se résume à la souffrance des personnages avec une tension horrifique qui est à son maximum.
Mais ce film horrifique n’est pas aussi simple qu’il y parait. Monsieur Laugier arrive de manière efficace à nous plonger dans l’esprit de ces deux jeunes filles. Nous nous identifions rapidement aux personnages, nous sommes torturés, battus pendant tout le film. Nous souffrons avec elles; le spectateur est tenu en haleine, terrorisé et souhaite que tout cela s’arrête. Pascal Laugier trouve une fin plutôt rapide, Deus ex Machina avec l’arrivée par surprise des autorités de police. Mais le réalisateur nous fait tellement souffrir pendant 1h30 que le spectateur, épuisé, ressent une sorte de soulagement en voyant enfin le bout du tunnel, la fin de ce masochisme et de cette barbarie.
Avec ce film, les limites de l’horreur ont été repoussées. Il faut être prêt psychologiquement avant de voir ce film. Aujourd’hui, les gens n’osent plus voir des films d’horreurs, les accusant souvent de manque de vraisemblance et d’utiliser souvent les mêmes techniques pour effrayer le spectateur : Screemers (Jump Scare), bain de sang etc… Mais Ghostland est un tout autre genre, vous n’y verrez aucune créature fantastique, aucun démon ou force démoniaque… Ce film se déroule dans notre monde bien réel, et finit par prendre le contrôle de votre cerveau. Peu à peu, le spectateur se sent enfermé dans cette maison en compagnie de ces deux psychopathes. Et c’est sûrement la raison pour laquelle nous voulons regarder des films d’horreurs. Nous souhaitons souffrir, pleurer, trembler aux côtés des héroïnes et ressentir de vraies sensations fortes ! Le cinéma manque de renouveau, d’un nouveau style horrifique…
Ghostland est un grand film. La réalisation est très bien menée, les acteurs jouent brillamment, la photographique est magnifique, l’histoire est prenante…Que demander de plus ?
Ce film est unique dans son genre. Il est cru, brutal, macabre. Une vraie claque en pleine face ! Pascal Laugier détient tous les ingrédients pour la fabrication d’un excellent film d’horreur. Un nouveau style horrifique est-il né ?
Un chef d’œuvre à voir et à revoir !