On y retrouve bien ce mix entre le film d'aventures et le film fantastique mais le film recèle au sein de sa narration et de sa fabrication un autre tour, un poil plus roublard. J'ai découvert ce film à travers sa bande-annonce, et je dois dire que l'impact visuel de ses différentes images est déjà très fort. Mais il y avait dans le ton des acteurs un truc qui me gênait. Ils jouaient un peu faux et le ton était parfois mal assuré, mais je me disais que ça faisait partie du délire, et qu'une fois dans l'ambiance, ça ne me dérangerai pas tant que ça. Et pour cause, j'ai compris à la faveur d'un gros rebondissement que c'était dû à la nature même des comédiens. Un choix plutôt audacieux donc, qui va dans le sens de la thématique que voulait traiter Bertrand Mandico, et qui est là encore bien dans l'air du temps : la fin de la norme hétérosexuelle. Bon, c'est un mythe qui n'existe que dans certains cercles intellectuels, mais qui occupe une part de plus en plus dominante dans les médias. Le sujet est ma foi plutôt bien traité, avec un côté agaçant, un peu bobo et parfois même un peu flou, mais ça n'envahit pas trop la portée du film. En soi, «Les garçons sauvages» reste un film d'auteur aux tics parfois agaçants, son maniérisme formel se révélant parfois à double tranchant, avec des plans contemplatifs pour ne rien dire ou bien des séquences trop longues (comme la bataille dans les plumes sur la plage qui vire presque à la partouze). En gros, il faut déjà être réceptif à ce genre de cinéma, ou plutôt d'expérience comme on aime à dire (ou pour employer une autre phrase bien clichée, il faut s'ouvrir à l'univers de son créateur). Alors visuellement, ça donne des images bluffantes, rarement vues dans le cinéma français mais aussi au cinéma tout court. La photo est magnifique, le parti-pris de la jungle et son climat tropical en noir et blanc rend plutôt bien, ce format Super 16 est un peu rétro et colle bien à l'univers du film, il y a les irruptions de la couleur, aux bons moments et avec des choix graphiques forts, bref, c'est clairement un film, qui, formellement, fait preuve d'une belle identité. Reste que le fond, lui, est un peu plus diffus. On met du temps à comprendre où il veut en venir, à la fin, on reste encore un peu dans le flou, quand bien même l'ambiance fantastique sied à merveille au film. Alors, grand film qui réfléchit sur les genres ou bien petite arnaque intellectuelle destinée à des happy few ? Difficile à dire tant le propos se détache de la forme. Difficile à dire aussi parce que le tout ne fait qu'effleurer le thème, osant parfois quelques fulgurances, mais d'un point de vue philosophique, ça reste léger. Un film de festival qui mérite toutefois d'être vu, de part son expérience visuelle assez bluffante, qui propose une BO également remarquable, avec un gros travail sur le son et le bruit en général, un film à la lisière de l’expérimentation et de l'essai philosophique, un film qui tranche avec le reste de la production hexagonale. D'autres critiques sur thisismymovies.over-blog.com