S’il y a bien un continent qui ne nous envoie guère de nouvelles (et la situation géopolitique, économique et culturelle de la grande majorité des pays en faisant partie joue beaucoup), c’est l’Afrique. On a droit quelque fois à des films provenant du Maghreb ou d’Afrique du Sud mais pour le reste c’est vraiment rare, « Timbuktu », César du meilleur film il y a deux ans, faisant figure d’exception. Donc lorsqu’un film sénégalais arrive jusqu’à nous et qu’il ne soit pas cantonné à un genre expérimental ou dans une case traditionnelle ou ethnique, c’est-à-dire qu’il aborde un genre plus commun du septième art comme le polar ici, on est clients. Cependant, notre appréciation de « Wulu » est peut-être un peu biaisée par le plaisir de découvrir un film africain. En gros, si l’action du film se situait ailleurs, l’aurait-on apprécié de la même manière ?
Mais ceci mis de côté, on apprécie déjà de découvrir les lieux des l’action, un contexte aux antipodes de ce que l’on peut voir au cinéma à l’heure actuelle. Des douanes africaines aux frontières jusqu’aux marchés bondés de Bamako en passant par le trafic de drogue entre pays frontaliers, on découvre des choses avec curiosité et la manière réaliste dont est filmée l’action flirte avec le documentaire sans jamais y sombrer. « Wulu », s’il ne se départit pas de son côté thriller, navigue régulièrement dans certaines séquences avec un aspect investigation pas déplaisant car intéressant. Néanmoins, il faut avouer que l’ossature générale du long-métrage de Daouda Coulibaly n’est guère originale. On assiste à la naissance d’un dealer, sa montée dans la hiérarchie du trafic de drogue, à un début de chute puis au dernier coup. Des passages obligés qui ne bousculent pas vraiment l’ordre établi du polar ou de l’étude de caractères mais contrebalancés par un rythme soutenu.
« Wulu » arrive sporadiquement à nous tenir en haleine comme lors d’une fusillade que l’on n’attendait pas ou lors des passages à la douane du trafiquant forcément stressants. Le film est pertinent également quand le polar croise un contexte plus politique. En effet, lorsqu’il scrute l’influence de la cocaïne dans les arcanes du pouvoir au Mali c’est probant. Mais le fait de le marteler à la fin par un écriteau qui tombe comme un cheveu sur la soupe pour se donner une contenance plus sérieuse, au lieu de le laisser en arrière-plan, est inutile. La partie sentimentale et/ou familiale est quant à elle plus convenue et moins attachante et il n’était pas forcément nécessaire de la creuser autant. C’est déjà vu, en mieux et par le biais de l’humour, dans des comédies françaises comme « Le crocodile du Botswanga ». Rien d’extraordinaire donc dans ce petit film africain mais un moment sympathique, maîtrisé et aux antipodes qui change de ce que l’on peut voir habituellement.