Il y a cette France du Pas de Calais où vivent des gens simples, heureux, en famille, les filles allant à la danse et les garçons au foot. Il y a aussi cette autre France, tout aussi présente, celle des petites gens qui écoutent et chantent Patrick Sébastien, qui pensent que le mal vient des autres, a fortiori ces autres étrangers, et qui se laissent dominer par une pensée fasciste et raciste. "Chez nous" raconte cette France-là. Le film raconte aussi l'envers effroyable d'un parti qui, derrière les belles paroles, cache une vaste propagande, construite sur le rejet, et des réseaux intérieurs que les valeurs de violence, d'intolérance et de haine pétrissent. L'élue nationale, qui a ses appartements à Neuilly sur Seine, face Tour Eiffel, ressemble à une autre, tristement connue, blonde comme elle, sournoise et manipulatrice, et son adjoint, brun et intelligent, ressemble à un de ses proches aussi. "Chez nous" est manifestement bien documenté. Le réalisateur cherche à dénoncer. Il y a va avec détermination, sans compromis. C'est ce qui manque au film. Si l'on est prêt à croire à cette terrible mascarade politique, on aurait préféré un peu de nuance, car pour les plus convaincus des spectateurs par cette idéologie haineuse, le film comporte le risque de les y conforter. Après le léger et délicat "Pas son genre", Lucas Belvaux s'intéresse de nouveau aux terres du Nord pour se plonger dans un sujet d'actualité. Cela ressemble à un beau téléfilm. En tous les cas, c'est un tremblement pour nos consciences endormies à quelques semaines des élections.