Peau d’âne est un film qui semble quand même faire l’unanimité, et à vrai dire les seules critiques très négatives sur le film que j’ai pu lire porte sur l’introduction de l’hélicoptère à la fin. C’est vrai que cela peut surprendre, même s’il est bien entendu que la fée voyage dans le temps plus tôt dans le film !
Enfin bref, ce détail mis à part dont le film aurait pu se passer, Jacques Demy signe quand même un métrage des plus réussis.
Visuellement bien sûr. Pas grand-chose à redire. Entre les costumes magnifiques, la photographie et les couleurs sublimes, les décors à la fois classique et originaux, la mise en scène pleine d’élégance, les idées étonnantes et les effets spéciaux des plus soignées, Peau d’âne est un très beau film sur la forme, qui vieilli fort bien en plus. La restauration dont il a fait l’objet lui a été de surcroit très profitable. La beauté des images est servie par la beauté de la musique. La musique en elle-même est superbe, mais il y a aussi quelques chansons devenues des classiques dans le répertoire. Si certaines n’ont rien de spécial, en revanche d’autres sont originales et apportent un vrai plus au film. Ce n’est pas si fréquent dans les comédies musicales. En plus ce n’est pas non plus envahissant outre mesure.
Le casting est emmené bien sûr par Catherine Deneuve, sublime, et très crédible dans son rôle. Si elle retient l’attention néanmoins je dois quand même avouer que Jean Marais offre une prestation charismatique et particulièrement marquante, donnant un vrai volume à la première partie. Jacques Perrin qui s’empare du premier rôle masculin dans la deuxième partie, sans démériter, n’a quand même pas le charisme de Jean Marais, mais il campe un prince crédible aux allures de doux rêveur qui colle bien au film, et à Jacques Perrin aussi ! Le casting en tout cas est très relevé, les personnages sont bien écrits, et cela donne à l’écran un résultat tout à fait convaincant.
L’histoire s’inspire bien sûr du conte, de façon assez fidèle d’ailleurs. Reste que Jacques Demy est suffisamment artiste et original pour imposer aussi sa propre patte sur le film. Il nourrit l’ensemble d’une fantaisie supplémentaire, introduit des éléments assez déconcertants parfois mais qui finalement s’harmonise bien à l’univers montré. Croisant Perrault, Doré et ses propres concepts, je ne crois pas que c’est ce qu’il a amené qui donne le plus de relief au film, mais clairement cela donne une teinte propre et singulière au film, et c’est une démarcation audacieuse qui ne fonctionne pas si mal du tout.
En tout cas Peau d’âne est un film marquant. Ce n’est pas le genre de film qu’on regarde et qu’on oublie aussitôt. Très beau, audacieux, solidement interprété, je pense que c’est un des films français les plus esthétiques, mais je pense, plus largement, que c’est un des films français les plus notables de son époque, et qui garde beaucoup de saveur. 5.