Il ne suffit pas d'avoir du talent pour faire un bon film. Si Almaric avait eu le courage de construire une vraie bio de Barbara en ne gardant que les scènes du film qu'il prétend tourner avec Jeanne Balibar, en enlevant les scènes où la présence de son propre personnage (le cinéaste) qui n'apporte rien, il aurait réalisé un grand film et pas seulement une sorte de mélange informe entre des évocations génialement incarnée par Balibar et des épisodes creux de tournage qui n'apportent rien. Certes, alors, il aurait fallu accepter de réaliser un film traditionnel suivant un plan assez classique: l'enfance, Bruxelles, l’Écluse, l'auteur-interprète des belles chansons poétiques, les tournées, le retrait de la scène. Cela aurait supposé aussi de mieux traiter la période difficile de Bruxelles et les débuts, de ne pas taire la question majeure du père.
Mais un film comme cela supposerait de la modestie et pas seulement du talent, cette modestie qui est la qualité d'un grand cinéaste, le talent ne permet rien, c'est la modestie qui rend génial.
D'une manière générale, il me semble que toutes les œuvres (littéraires ou artistiques) sur ou d'après Barbara sont brouillonnes, peu intéressantes et souvent inutiles. En revanches les œuvres de Barbara sont d'une beauté tout à fait classique qui émeut directement : équilibre de la musique, construction parfaitement raisonnée des chansons, maîtrise de l'émotion qui passe dans l'interprétation, que ce soit par sa voix que par l'accompagnement piano et/ou instrument. On sent qu'une longue réflexion et qu'un travail intérieur puissant a aboutit à chacune de ses chansons. Cet ordre esthétique ne se reflétait pas dans sa vie qui était très complexe, comme tout vie finalement.
Alors, quand on parle d'elle, lorsqu'on joue" sa musique ou qu'on chante ses textes, la question est de savoir sur quel point on insiste : la beauté des œuvres (et dans ce cas-là ne vaut-il pas mieux passer ses disques ou regarder les utube - par exemple ceux du compte barbaraegnimatique - ?) ou la difficulté de sa vie (et dans ce cas-là est-ce que la lecture de son autobiographie ne suffit pas ?).
Post-scriptum : j'ai entendu une journaliste de cinéma (sur France -Inter ?) dire que Barbara "ne connaissait pas la musique" et écrivait d'instinct. Or, Barbara avait suivi des cours de chant et de piano de haut niveau jusqu'au conservatoire, chantait les mélodies de Fauré qui sont affreusement compliquées et trouvait les harmonies les plus subtiles pour ses propres mélodies qui sont souvent très ambiguës du point de vue tonal, a engagé les meilleurs musiciens de jazz français avec qui elle discutait d'égal à égal (Portal, Louiss, Galiano, Lockwood). A part ça elle ne connaissait pas la musique ... Certains journalistes feraient mieux de changer de métier.
Post-postscriptum : tous ceux qui l'on connue disait qu'elle était très drôle, faisant en permanence le clown pour divertir l'assemblée. Je le note car il ne me semble pas qu'Almaric le rende.