[SPOILERS] Certains films méritent d'être vus plusieurs fois... Quand j'ai vu ce film étant gosse, je l'ai détesté (tellement que je n'ai jamais voulu le voir en entier, mais bon j'étais gosse). Puis je l'ai revu sérieusement y'a 3 ans et je l'ai trouvé assez bon, sans plus. Il repassait ce soir à la télé et comme j'étais pressé de le revoir, je me suis mis devant et là, je dois bien avouer que c'est une petite claque. Lors de mon deuxième visionnage, j'avais trouvé le film excellent jusqu'à la mutation de Brundle, que je trouvais inutilement gore et surtout où je n'avais ressenti aucune compassion pour le personnage principal mais seulement du dégoût. Force est de constater qu'il y a quelques minutes j'ai relu ma précédente critique sur Allociné et je me vois obligé de la modifier car je ne comprends pas comment j'ai pu autant passer à côté de la seconde moitié du film. Certes, la deuxième moitié est assez gore, mais pour une fois dans ma vie j'ai trouvé nécessaire ce côté dégueulasse. Seul bémol qui est pour moi la plus grosse erreur du film : les vomissements d'acide vers la fin du film qui, pour moi, n'ont pas lieu d'être (d'autant que physiquement une mouche n'agit pas de la sorte). Outre les 4 vomissements qui sont pour moi de trop dans le film, j'ai enfin pu apprécier le film dans son entier à sa juste valeur. J'y reviendrai plus tard, pour me concentrer d'abord sur la première moitié du film. Même si j'ai mieux apprécié la transformation de Brundle, je préfère quand même légèrement la première moitié du film qui nous présente le personnage de Jeff Goldblum dans un espèce de taudis-labo piteux, en scientifique sur le point de faire une découverte révolutionnaire. Le sujet de base est intéressant et vraiment original. Je crois que La Mouche est l'unique film qui fait de la téléportation son sujet principal. Cronenberg nous sert un scénario digne de ce nom et bien plus malin que la plupart des films d'horreur que j'ai pu voir (genre cinématographique avec lequel je suis en froid). L'idée de départ, qui provient d'un film de 1958 lui même issu d'une nouvelle de Langelaan, est géniale et même si on est dans le cadre de la science-fiction (car on voit mal comment fusionner les génomes d'une mouche et d'un humain), l'idée est suffisamment réaliste pour que l'horreur opère dans toute sa splendeur. Impossible de ne pas se mettre à la place de Brundle et de ne pas tenter de ressentir l'épreuve qu'il traverse tout au long du film. Un génie qui avait tout pour réussir mais se retrouve piégé par ses propres erreurs. La mise en scène est vraiment particulière et donne une ambiance très sombre voire malsaine qui fait de La Mouche un film unique en son genre. Pas d'effets ridicules ni de scènes inutiles, le film se suit avec fluidité et cohérence avec un minimum de casting et de décors, pour finir par transformer ce lieu et cette vie en véritable enfer. Les scènes d'horreur s'accumulent, et ça commence fort avec l'une des séquences les plus insupportables du film - le test sur le premier babouin - qui est moralement affreuse. Puis la transformation glauque et pitoyable de Brundle m'a franchement renversé car le personnage se retrouve peu à peu dans un corps étranger, un corps dégueulasse et il est clair que cette situation abonimable et irréversible doit être dure à digérer, surtout lorsqu'on est aussi seul que Brundle. Ce que je n'avais pas capté la dernière fois, c'est tous les états d'âme et les angoisses de Brundle qui se voit se détériorer et muter en véritable monstre. Il tente intelligemment de trouver des points positifs à son changement afin de ne pas tomber dans l'angoisse totale, en se "réjouissant" faussement d'être le premier homme-mouche jamais créé, ou éventuellement le premier insecte politique de l'histoire, mais on sent dans les yeux de Brundle-mouche une panique et un désarroi terrifiants qui m'ont énormément saisi. Les dialogues entre Brundle et Veronica sont puissants et montrent la douleur que peut ressentir le pauvre homme en se voyant tomber en lambeaux et devenir un monstre. C'est alors plus une horreur morale que physique que le film propose, et c'est ce que j'avais zappé la dernière fois, car elle est masquée par des images dégueulasses. Et effectivement, je retire tout ce que j'ai pu dire sur le caractère inutile des effets gores de La Mouche, car pour créer cette horreur morale, l'horreur visuelle est nécessaire. Qui plus est le film monte en tension et en gore jusqu'à la toute fin, mais surtout en tristesse. Avant je voyais La Mouche comme un film dégueu, et ce soir je le vois comme un film triste, très triste. La dernière scène du film est d'une tristesse absolue et m'a un peu bouleversé, car on sent les sentiments de Brundle derrière les yeux de la bête, et c'est affreux. Geena Davis est géniale dans son rôle, mais que dire de Jeff Goldblum qui signe ici le meilleur rôle de sa carrière ? Cet acteur est un ovni qui mériterait plus de visibilité sur grand écran. Chef d'oeuvre.