La claque de cette rentrée ! Attention au grand huit émotionnel, sortez vos mouchoirs! On en ressort fourbu, les yeux rougis, une boule dans le ventre et le coeur en miette. C'est cru, hard, cash, sans concession (pourquoi pas d'interdiction au moins de 12 ans? Plus par son approche de la mort que par ses scènes de sexe d'une folle beauté) comme c'est poétique, drôle, sensible, sensuel, politique, engagé sans démonstration.
Petit miracle aussi cinématographique avec une mise en scène éblouissante. Robin Campillo sait montrer le virus de SIDA sans scènes visuellement choquantes (pas de ravages de la maladie par exemple). Tout reste pudique mais pas pour autant aseptisé et violent. Bien au contraire! C'est par les scènes (parfois longues) en boite de nuit que le virus se propage insidieusement, alors que la fête est à son comble. On sent que la mort rôde et ne s'est pas gênée pour attaquer encore. C'est la mort qui cogne à la vie ! Les effets visuels proposés, l'utilisation de certaines métaphores est censée et assez poétique (le fleuve rouge sang, les éléments de poussière qui se mêlent à une molécule de virus...). On ressent l'urgence à vivre de ces hommes et femmes, qui s'oppose comme elle se lie au danger permanent, à la déchéance ; comme la révolte et la colère percutent la beauté de la vie ! Tout est beau ici : la bande son, les couleurs, les images léchées, le montage, les dialogues directs.
Le réalisateur sait également filmer les manif, les actions, les oppositions et les égos internes, la peur de la mort, comme les corps (scènes de sexe et d'amour bouleversantes...d'amour et de justesse), les émotions, les coups d'éclats de ces activistes qui ont la vie chevillée au corps, une certaine réalité et une époque. La mienne.
Et pourtant j'étais loin de bien comprendre cette vie, ces actions mal montrées par les médias qui les dépeignaient comme des fous furieux. Ils sont dc qq part réhabilités : ils agissaient avant tout comme des humains épris d'amour, de vie et de justice, laissés pour compte d'une société qui n'avançait pas à la même vitesse, à qui on cachait qu'une minorité se mourrait, abandonnée par les pouvoirs publics incompétents et lâches. Merci donc au réalisateur de rentre hommage à ce groupe qui mérite ce coup de projecteur car leurs actions au final, qu'on soit pour ou contre, a certainement fait avancer les choses. Ici d'ailleurs, pas de jugement, juste des faits dans la première partie.
La deuxième partie dévie lentement vers l'histoire d'amour entre 2 personnages attachants qui vont se révéler autrement au fur et à mesure que la mort prend le dessus. A l'urgence de vivre du départ, s'oppose la lente et presque misérable agonie d'une jeunesse qui voulait juste s'amuser et se retrouve prise dans un combat amer et qui devait certainement la dépasser. Voici un vrai couple de cinéma avec ces derniers instants d'amour et de plaisir (déchirante scène de sexe à l'hôpital ou comment donner encore une fois à l'autre, sans misérabilisme, juste pour l'autre). Le vrai don de soi. Le réalisateur confronte les spectateurs à la mort et elle n'a rien d'envieuse. Elle est dure, laide, lente, choquante. Comme elle permet la réunification de personnes différentes (c'est intéressant de ne jamais les montrer en-dehors de leurs actions justement, comme s'ils n'étaient identifiables que par leur révolte au sein d'act-up, leur séropositivité, leur homosexualité).
Les acteurs sont merveilleux : mention bien sur à la révélation Nahuel Perez Biscayart, et au couple si tendre et complice qu'il forme avec Arnaud Valois.
Que dire de plus si ce n'est d'y aller aussi vite que cette jeunesse a été décimée. Remettre l'histoire dans son contexte et sa vérité. Pleurer sur tout ce qu'on a perdu, pas vu et pas su. Merci ACT UP d'avoir osé défier les lois et les autres et tenté de réveiller une époque bien pensante, avachie dans ses principes. Je me réveille en retard mais pleine de gratitude et d'espoir. Ce film est avant tout une formidable et vibrante leçon de vie, de respect et d'amour pour la différence.