Parfaitement raccord avec la politique du toujours plus et l'ironie post-moderne, revoilà donc le super-héros le plus irrévérencieux du paysage, le justicier qui enchaine les blagues aussi vite qu'il se prend les bastos, j'ai nommé Deadpool.
Pour renouveler un genre qui se ringardise à mesure que les budgets pharaoniques deviennent la mode, la solution? Déversez les litres de sang, ils engloutiront le film et emporteront la planète. Est-il bien utile de rappeler que le premier fut un triomphe commercial, prouvant par la même qu'on pouvait répéter la même histoire en la plaçant au centre d'un tourbillon d'humour potache, de références grossières et de têtes coupées?
L'acteur Ryan Reynolds tenait sa revanche, le rated-R devenait cool, et les financiers se frottaient les mains. La suite collera au même crédo. Plus de sang, plus de clins d'œils, plus de tout. Qu'attendre d'autre puisque le ton décalé fait partie de l'ADN du personnage? Il était néanmoins possible de trouver ça tout à fait vain et gratuit. Ce fut mon cas en découvrant Deadpool. Pourquoi donc aller voir sa suite? Je pense - peut être par excès de naïveté - qu'il est encore possible de redonner quelques couleurs au genre. Et donc, pourquoi n'en serait-elle pas capable? Elle a les moyens (budget quasi-multiplié par 2) pour tenter le coup. Malheureusement, Deadpool 2 veut surtout enfoncer le clou.
D'un cynisme carabiné, le film remplit le rôle d'un VRP chargé de faire grimper ses propres actions en misant sur ce qu'il sait faire plutôt que sur ce qu'il pourrait faire. Il reproduit donc mécaniquement ce qui faisait la "réussite" de son prédécesseur. Les références méta pleuvent, un déluge de vannes égrène chaque minute du film. Dans l'intervalle, bien heureux sera celui qui trouvera une histoire à laquelle s'agripper et une bonne raison pour s'investir. Difficile de se sentir concerné par un film qui annule toute émotion par d'incessantes et vulgaires pitreries. Pour ceux qui en espéraient plus, il faudra se contenter d'un ratio plutôt mince : une bonne blague qui passe sur cinq blagues beaufs qui cassent. Je tiens néanmoins à signaler un effort derrière la caméra. Rompu à l'exercice de style orienté action, David Leitch (réalisateur de John Wick ou Atomic Blonde) confirme ses talents pour bâtir quelques séquences spectaculaires. Bien qu'il reste problématique d'un point de vue esthétique (de nombreux CGI sont perfectibles), Deadpool 2 fait également un peu mieux que son aîné à ce niveau. L'abattage de Ryan Reynolds va de l'insolite à l'insupportable, c'est donc plus du côté de Josh Brolin que le film trouve un peu d'intérêt (bien que le comédien reste sous-employé).
Ironiquement, j'ai trouvé cette suite légèrement supérieure à l'original. Elle ne vole pas haut, mais vu que le premier mettait la barre assez bas...Pour une vraie proposition, il faudra par contre se faire une raison : Deadpool a peut être le potentiel pour rabattre les cartes, mais il n'en a manifestement ni le cran ni l'envie. Il joue la sécurité (une vanne, un jet de sang, une vanne, un jet de sang) et s'il est fort probable qu'il remporte la partie (au Box-Office), c'est parce qu'il n'y a finalement pas grand chose en jeu.