En adaptant son propre roman "Eddie Crumble is a clapper", Dito Montiel (aucun lien avec Bernard a priori) avait sans doute l'intention de dénoncer la manière dont les médias américains se repaissent de la vie d'anonymes pour mieux les ridiculiser. Étonnamment, "The Clapper" ne fonctionne pas vraiment de ce côté en prenant la forme d'une satire très caricaturale, néanmoins, le film parvient à faire entrevoir un semblant d'âme lorsqu'il s'attarde sur l'attachante amourette entre les personnages d'Ed Helms et Amanda Seyfried.
Eddie Crumble est donc un "clapper", une personne engagée pour applaudir, réagir et poser des questions toutes faites dans le public d'émissions de téléachat bas de gamme. Un jour, un animateur d'un célèbre talk-show remarque son omniprésence sur tous ces plateaux de tournage et le cible comme objet de moqueries jusqu'à en faire un phénomène télévisuel. Essayant de conserver tant bien que mal son anonymat, Eddie est pourtant de plus en plus reconnu et son amour naissant avec Judy, une caissière de station-service, commence à subir les conséquences de cette folie médiatique...
Reconnaissons-le d'emblée : sans Ed Helms, "The Clapper" serait sans doute déjà au fin fond des oubliettes cinématographiques. D'ailleurs, le film paraît presque s'en rendre compte en choisissant de laisser un bon moment en toile de fond la spirale infernale dans laquelle son personnage se retrouve pour mieux se concentrer sur ses rencontres avec la jolie Judy. Le comédien excelle alors dans ce personnage aussi paumé que maladroit, semblant se laisser volontairement sur le bas-côté de la vie (la raison confessée derrière cela ne le rendra que plus attachant) mais qui y reprend goût face aux sentiments endormis que réveillent chez lui la jeune fille de la station-service. C'est bien dans cette partie que "The Clapper" délivrera ses meilleurs moments (et sa plus belle réplique : "Eddie, avant-hier, un type est venu à la station à deux heures du matin, avec une télé sur la tête... qui marchait. J'aurais tellement voulu que tu sois là avec moi pour voir ça. Et alors, j'ai compris."), pas forcément d'une grande originalité mais ceux qui aiment les histoires d'amour entre des personnages décalés et marginaux y trouveront forcément leur compte de mignonneté un brin naïve et touchante.
Par contre, lorsque le grand barnum médiatique rattrape Eddie et met à mal sa relation avec Judy, "The Clapper" perd pied en grossissant le trait sur toutes les situations engendrées. La satire tombe ainsi dans le manichéisme le plus facile et usé, les producteurs sont de simples stéréotypes sur pattes face à des anonymes manipulés uniquement à des desseins d'audience -on s'en doutait à peine. En se fixant sur l'engrenage dans lequel s'enfonce Eddie pour retrouver sa bien-aimée, le film perd finalement de vue le charme de son personnage et passe complètement à côté de ce qui aurait pu devenir un vrai discours acerbe en faisant d'Eddie une victime parfaitement consciente d'utiliser la volonté médiatique pour la retourner contre elle-même. Au lieu de ça, le film se sabotera tout seul, trahissant sa perte de cap réaliste par une ellipse sortie de nulle part et l'arrivée tonitruante voire ridicule d'un nouveau protagoniste qui achèveront d'envoyer son dernier acte dans les grosses ficelles du happy-end on ne peut plus basique.
Jamais vraiment drôle (exception faite de la scène hilarante de la série mexicaine) à l'image d'un Tracy Morgan qui erre dans le film sans savoir quoi faire et dépourvu d'un regard neuf pour étayer une sempiternelle critique du système médiatique US, "The Clapper" ne vaut que pour la tendresse émanant du couple au coeur de son histoire. Pas sûr que cela soit néanmoins suffisant pour déclencher des salves d'applaudissements...