Si le concept du film à sketchs horrifiques paraît connaître un nouvel essor ces dernières années, rares sont ceux qui font l'effort d'intégrer leurs segments dans la logique globale d'une histoire bien construite et, la plupart du temps, on assiste à des longs-métrages préférant opter pour la facilité d'une thématique avec un fil rouge rudimentaire ou même absent. En choisissant de revenir aux fondamentaux du procédé et donc de se bâtir dans le contexte d'une véritable finalité narrative, le film réalisé par Andy Nyman et Jeremy Dyson (basé sur leur propre pièce) marque déjà clairement un point pour emporter notre adhésion.
En résonance avec son enfance au côté d'un père bien trop porté sur la religion, Philip Goodman s'est donné pour but de démystifier tous les charlatans du surnaturel qui croisaient sa route. Un jour, un professeur qu'il avait pris pour modèle et porté disparu depuis des années le convoque et lui proclame haut et fort que les phénomènes paranormaux sont bien réels, notamment à cause de trois affaires auxquelles il n'a pu trouver d'explications rationnelles. Bien décidé à lui prouver le contraire, Goodman part enquêter sur ces trois dossiers...
Une virée dans un ancien asile pour femmes en compagnie d'un gardien de nuit, l'accident de voiture mystérieux d'un adolescent en pleine forêt et la découverte d'un poltergeist par un riche homme d'affaires dans sa propre maison, voilà le menu des trois cas énigmatiques au coeur de "Ghost Stories"!
Chacun a son propre ton : le premier tape dans la terreur old school et efficace que lui offre son décor, le deuxième est dominé par l'anxiété troublante de son héros (la découverte de sa maison est peut-être plus flippante que le reste) et le troisième est emporté par l'énergie cassante d'un Martin Freeman décidément toujours parfait, mais tous sont habités par un mélange d'effroi et d'humour typiquement british qui donne une patte décalée et terriblement bienvenue à "Ghost Stories".
Surtout, chacune de ces histoires donne le sentiment qu'une explication rationnelle puisse se cacher derrière les faits qui nous rapportés par leurs narrateurs, tous ont en effet un passif ou une personnalité qui les renvoient à une forme de culpabilité pouvant faire passer les phénomènes auxquels ils ont été confrontés comme des échos de leurs esprits aux maux qui les habitent. Tous reliés entre eux par des détails redondants, ces sketchs semblent bien évidemment privilégier la piste surnaturelle pour déstabiliser un Goodman beaucoup trop sûr de son fait et cachent en sous-marin une finalité qui prendra tout son sens à la lumière d'une quatrième partie révélant un twist plutôt malin pour remettre les événements du film en perspective face aux éléments mystérieux que l'on pouvait relever ici et là.
Certes, ce n'est pas le rebondissement de l'année mais il a le mérite de sa logique et d'être parfaitement construit au regard de tous les détails qui l'ont précédé et qui nous sont rappelés avec une certaine jubilation pour mieux connecter l'ensemble du film. Si le procédé est efficace et que la surprise qui en découle fera son petit effet, cela aura aussi pour conséquence d'amoindrir a posteriori l'impact de chacune de ces histoires, toujours sympathiques mais qui donnaient déjà l'impression de s'interrompre trop brutalement vu leur potentiel. En s'inscrivant dans ce tout bien plus large, elle perdent ainsi encore un peu plus en envergure et c'est quelque part dommage au vu du risque pourtant attractif de les avoir inséré dans ce contexte.
On ressort finalement partagé de "Ghost Stories", il est impossible de nier qu'on s'est plutôt bien amusé devant ce petit film bien construit, réalisé, interprété et proche de la véritable essence des films à sketchs du genre d'antan mais il n'arrive jamais à bousculer son statut de "petit film" pour nous laisser entrevoir quelque chose de plus grand que l'idée finale sur laquelle il reposait.
En fait, on pourrait le résumer à un tour en train fantôme plutôt roublard que l'on a vraiment apprécié (et ce n'est déjà pas si mal dans un sens pour un film nommé "Ghost Stories") mais, sitôt l'attraction finie, l'adrénaline retombe trop vite et on oublie déjà un peu ce que l'on vient d'y vivre...