Pour son “grand retour” au cinéma après plusieurs années de pause télévisuelle, Steven Soderbergh surprend un peu avec un “Logan Lucky”, un petit film au profil bas, construit autour de l’idée un peu absurde de recycler les mécanismes artificiels de la série “Ocean’s Eleven” (ce qui n’est pas ce que Soderbergh a fait de mieux) dans le milieu redneck, en filmant le tout avec un réalisme et une empathie typique des projets les plus minimalistes de ce cinéaste versatile (souvenons-nous de l’excellent “Bubble” par exemple). Le résultat, ce qui n’est pas une surprise tant le pari semblait risqué, ne fonctionne pas vraiment, l’intrigue abracadabrante d’un holdup improbable, avec un twist final dont on se serait bien passé, n’adhérant jamais vraiment à la peinture attachante d’une Amérique traditionnelle, un peu simplette mais indiscutablement pleine de vie et d’énergie. L’un des principaux problèmes de “Logan Lucky”, au-delà de son scénario capillotracté, est la légèreté, voire la superficialité du propos de Soderbergh : on pense souvent au travail des Frères Coen, sauf qu’ici, on ne débouche jamais sur une vision particulièrement “profonde”. Il n’y a visiblement aucun questionnement existentiel chez Soderbergh, qui semble comme souvent se contenter d’aligner des situations divertissantes, ludiques, voire même des clichés triviaux (la scène tire-larmes du “pageant” et de la chanson patriotique). Cette obsession – louable a priori – pour la légèreté joue finalement contre le plaisir du spectateur : les nombreux moments humoristiques du film ne font jamais rire, tandis que les scènes de “suspense” (le casse lui-même) s’enchaînent sans provoquer en nous la moindre réaction. “Logan Lucky”, comme ce fut le cas de plusieurs projets précédents de Soderbergh, défile devant nos yeux comme un spectacle malin, plutôt bien réalisé – une photographie magnifique, des acteurs au top, dont un Daniel Craig mémorable qui se régale à dynamiter son image, et une mise en scène toute en finesse -, mais totalement anodin. Aussitôt vu, aussitôt oublié.