Quand les gens de spectacle (cinéastes ou autres) déclarent qu’ils prennent leur retraite, on est toujours en droit de demeurer sceptique. En 2013, à Cannes, Steven Soderbergh avait annoncé qu’il renonçait au cinéma sur grand écran. Or, quatre ans plus tard, le voici de retour ! Et, qui plus est, avec un de ses meilleurs films !
La recette n’est pourtant pas très novatrice : c’est celle que Soderbergh a déjà déclinée jusqu’à satiété dans « Ocean’s eleven » et ses suites. On pourrait la trouver totalement éculée, mais il n’en est rien. Car s’il s’agit bien à nouveau d’une histoire de casse, le cadre et les personnages, eux, changent radicalement. Au lieu de pros du larcin façon George Clooney, nous voici transporté du côté de l’Amérique profonde, celle des laissés-pour-compte et des gangsters qui ressemblent davantage aux Pieds Nickelés qu’à des gentlemen cambrioleurs. Du coup, le regard change et se charge d’empathie : les personnages cabossés de « Logan Lucky » nous touchent bien plus que ceux qui oeuvraient dans « Ocean’s eleven ».
Pour être cabossés, ils le sont dans « Logan Lucky » : Channing Tatum joue un ancien footballeur blessé à la jambe devenu ouvrier sur un chantier et perdant son travail précisément parce qu’il boite, Adam Driver joue son frère, un barman amputé d’une main et devant porter une prothèse, Riley Keough leur sœur coiffeuse et Daniel Craig (bien loin de son rôle fétiche de James Bond) un spécialiste en explosifs qui purge une peine de prison.
Or c’est cette bande d’éclopés qui, sur l’instigation de Jimmy Logan (le personnage joué par Channing Tatum), décide d’entreprendre le vol de la recette d’une grande course automobile. Tout l’argent circule dans des tuyaux et est acheminé dans un sous-sol, ce qui n’a pas échappé à Jimmy qui, avant d’être licencié, a travaillé sur le circuit où doit avoir lieu la compétition. Comment vont-ils y réussir, sachant que l’un d’eux est en prison ? C’est l’enjeu, le suspens, les mille surprises d’un scénario malin comme tout qui parvient à renouveler les vieilles ficelles du film de casse.
Et puis, il faut le dire à nouveau, même si l’on a affaire à des cambrioleurs, on ne peut pas ne pas éprouver de la bienveillance pour eux. Jimmy Logan, d’ailleurs, n’est pas seulement un gangster à la petite semaine, mais aussi un papa. Et les quelques séquences mettant en scène sa fille désireuse de briller à un concours de chants sont particulièrement touchantes.