Outre le fait que cette histoire française soit racontée avec les mots de Shakespeare, ce qui peut s'avérer bizarre dans un premier temps, "Colette" s'annonce classique dans la forme mais provocatrice dans le fond. La première partie, un peu bancale, présentant une campagne française bucolique et une Keira Knightley adolescente ne laisse pas vraiment présager l'envergure déroutante de ce portrait de femme éprise de liberté. Les codes et coutumes de l'époque, soumettant la femme à l'homme et lui refusant la moindre liberté d'expression, imposent un cadre culturel fait de restrictions qui ne fait qu'accroitre le courage sulfureux de cette femme en avance sur son temps ! Que ce soit moral, artistique ou sexuel, ses affranchissements dans un monde patriarcal ont fait d'elle une icône de la liberté et du féminisme déterminant pour les générations futures. Et en cela, "Colette" rend très bien compte de ce destin atypique, notamment par la performance de son interprète Keira Knightley. Elle est espiègle, curieuse, déterminée, engagée et passionnée. C'est la ligne directrice qui donne à ce film en costumes un peu fade un accent passionnant. Au delà de ses oeuvres littéraires qui ont fait sa renommée, il faut entendre dans cette quête de liberté la détermination à accomplir de grandes choses, innovantes voire impossibles... Ne pas se contenter de se ranger dans les normes que la société nous impose, ne pas s'excuser ni avoir honte de nos actes et de nos idées, voilà ce que "Colette" éveille en nous.
On aurait préféré une mise en scène plus atypique, plus audacieuse à l'image de sa figure emblématique. Modèle de toute une génération et initiatrice d'un style et d'une façon de voir le monde, le film aurait gagné en toupet en se calquant davantage sur le personnage. En tout cas, c'est une sacrée occasion manquée selon moi. Car malgré une reconstitution propre, ces plans serrés sur ce Paris mondain manque de pétillant et, pour être extrême, d'âme. En effet, je ne suis pas sûr qu'on se souvienne de ce portrait dans quelques années, et ce, par le manque de prise de risque de la mise en scène. Mais l'esprit est là, nous rappelant le bel audace de cette femme qu'on se plairait à voir transposée dans notre époque, histoire de voir ce qu'elle penserait... et ce qu'elle ferait !