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    Problemski Hotel
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    Fêtons le cinéma
    Fêtons le cinéma

    704 abonnés 3 055 critiques Suivre son activité

    2,5
    Publiée le 7 octobre 2024
    Oscillant entre une forme documentaire brute et une quête esthétique quelque peu ostentatoire – en témoignent les plans fixes sur des objets, de la salle de réunion à un buffet aux allures de comptoir de cantine –, Problemski Hotel investit avec intelligence le quotidien d’êtres qui, en raison de leur statut de migrants, sont contraints à l’immobilité, non à l’immobilisme : les uns apprennent tant bien que mal le français, les autres installent périlleusement un arbre de Noël haut de six mètres, tous rendent possible un dialogue entre des cultures qui à la fois retranscrit la nature européenne de la capitale bruxelloise et sert de modèle à des politiques intérieures tournées pourtant vers le repli sur soi et la fermeture des frontières. Avec un certain humour, quoique souvent forcé, le réalisateur conjure tout misérabilisme et reproduit, telles des vignettes, le choc de deux ou de plusieurs mondes en contact dans un espace significatif, immeuble désaffecté qui porte en lui toute la froideur et toute la verticalité du pouvoir capitaliste. Une curiosité que l’on ne saurait cependant reconnaître comme aboutie ni pleinement maîtrisée.
    Jmartine
    Jmartine

    169 abonnés 677 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 30 novembre 2017
    Indéniablement un film fort...d’autant plus pour ceux qui, de prés ou de loin se sont trouvés confrontés au problème des migrants. Manu Riche, documentariste, ancien de l’émission Strip-tease « l’émission qui vous déshabille » a adapté, en 2015, le roman éponyme de Dimitri Verhulst écrivain belge d’expression flamande paru en 2003. Ancien journaliste, l’écrivain avait tiré matière pour son récit d’un reportage qu’il avait effectué dans un centre d’accueil de refugiés…Manu Riche et son équipe ont investi le 10ièm étage de la tour BNP au centre de Bruxelles qui était en train d’être délaissée par ses occupants…les bureaux abandonnés ont été garnis de lits à étage et de matelas pour devenir l’hôtel « Problemski » tour de Babel de refugiés de toutes origines…Cette tour m’a fait immédiatement penser à cette tour de Nanterre, ancien foyer de le la Poste où j’ai été amené à conduire des réfugiés évacués du métro Stalingrad…de ce huis clos baroque émergent deux personnages. Bipul, polyglotte, distingué, trouvé dans les toilettes de l’aéroport de Bruxelles, amnésique, ne sachant plus d’où il vient et quelle est sa langue maternelle…homme doux il inspire la confiance de ces naufragés atterris dans cet improbable hôtel…Son ami Maqsoon, turc d’origine, voudrais bien acquérir la nationalité belge par mariage et scrute les femmes belges qui ne portent pas d’alliance… pas toujours significatif …il y a Igor, le russe , en permanence à la salle de sport , se musclant pour espérer intégrer la Légion étrangère française…Lidia, la jeune kazakhe accompagnée de Martina, la jeune russe enceinte, qui rêve d’Angleterre…et tombe amoureuse de Bipul…et bien d’autres, que nous suivons dans un quotidien d’espoirs fous et d’ennui mortel, ponctué par la logique aveugle des refus administratifs et des reconduites à la frontière, …une administration plutôt caricaturale qui gère le centre, jusqu’à introduire dans les lieux, un sapin car nous sommes à la veille de Noël…ce sapin beaucoup trop grand passe d’étage en étage…total non sens…absurde belge ??? Le casting recrée la diversité des parcours de vie similaires aux personnages de la fiction. Tarek Halaby qui est Bipul est né en Palestine, exilé en Jordanie, puis à Dubaï avant de revenir en Belgique après un passage à Chicago…Maqsoon son ami est interprété par Gökhan Girginol d’origine turque…Lidia est Evgenia Brendes, qui a quitté son Kazakhstan pour entreprendre des études au conservatoire d’Anvers… Problemski Hôtel parvient avec virtuosité à mettre en balance le tragique et l’absurde, le désespoir et la légèreté...ce n’est pas spécialement un film sur les réfugiés, mais un film sur des gens qui attendent d’être à nouveau considérés comme les autres…Allez le voir car il passe dans un nombre limité de salles…Il le mérite !!!
    velocio
    velocio

    1 321 abonnés 3 153 critiques Suivre son activité

    3,5
    Publiée le 20 novembre 2017
    A 53 ans, Manu Riche, ancien de l’émission Strip-Tease et réalisateur de documentaires, ne s’était encore jamais aventuré dans la fiction. Pour ses débuts dans le genre, il a choisi d’adapter au cinéma un roman de Dimitri Verhulst, paru en 2003.
    Tout en haut d’une tour désaffectée de Bruxelles, vivent un grand nombre de demandeurs d’asile en provenance d’un peu partout dans le monde. Parmi eux, il y a là Bipul, le personnage central du film, un homme qui parle plusieurs langues mais qui n’arrive pas à se rappeler laquelle est sa langue maternelle : il a tout oublié de son passé et il n’a plus aucun papier. Un avantage : les autorités sont dans l’incapacité de le renvoyer dans son pays d’origine, inconnu de tous, y compris de lui-même ! Il y a Mahsun, un afghan qui n’a qu’une idée en tête : épouser une femme belge afin d’acquérir sa nationalité. Il y a Igor, un russe qui tente d’apprendre le français afin de pouvoir intégrer la Légion étrangère. Il y a Lidia, en provenance du Kazakhstan, qui rêve d’aller en Angleterre et d’entraîner Bipul avec elle. Il y a Shaukat, qui contraint sa femme Hafeeza à porter la burka et ne lui laisse aucune liberté. Et plein d’autres, encore.

    Nous introduire parmi les migrants et nous faire part de leurs problèmes de façon réaliste, le cinéma l’a déjà fait à plusieurs reprises. Pour son premier long métrage de fiction, Manu Riche a choisi une autre approche, beaucoup plus risquée : construire un film avec une succession de saynètes dans lesquelles il y a certes une bonne part de réalisme mais qui se mélange avec une dose importante de burlesque, de non-sens et de poésie loufoque. Ne pas oublier que le réalisateur est belge, après tout !

    Même s’il s’écarte très souvent d’une approche réaliste, Manu Riche a gardé de son passé de documentariste le besoin de choisir des comédiens ayant eu un parcours de vie proche de celui des personnages qu’ils incarnent dans le film. C’est ainsi que Tarek Halaby, l’interprète de Bipul, homme sans passé et sans patrie, est né en Palestine et qu’il est passé par la Jordanie, Dubaï et Chicago avant d’intégrer comme danseur la compagnie de la chorégraphe belge Anne Teresa De Keersmaeker. Le rôle de Mehsun est tenu par Gökhan Girginol, comédien et metteur en scène de théâtre d’origine turque. Quant au rôle de la kazakhe Lidia , c’est Evgenia Brendes qui l’interprète : elle a quitté le Kazakhstan il y a 10 ans !

    C’est la deuxième fois qu’un roman de Dimitri Verhulst fait l’objet d’une adaptation cinématographique. La première fois, c’était en 2009 pour son roman La merditude des choses, film réalisé par Felix Van Groeningen. Un titre qui aurait tout aussi bien convenu pour Problemski Hotel. Ce film de Riche sur les damnés de la terre est tout à la fois sombre et lumineux, désespéré et plein d’espoirs, pathétique et drôle.
    anonyme
    Un visiteur
    4,0
    Publiée le 29 novembre 2017
    Transversal par essence, discipline impure à la croisée des arts, le cinéma peut atteindre la grâce par sa pratique subtile du collage. Littéraire et visuel, ancré dans le monde contemporain tout en se plaçant hors du temps, Problemski Hôtel parvient à un état d'équilibre aussi rare que magique.

    Documentariste et contributeur du programme *Strip-tease*, Manu Riche réalise son premier long métrage de fiction en adaptant avec Steve Hawes le récit éponyme de Dimitri Verhulst. Grand succès littéraire du début des années 2000, le texte naît d'une enquête menée par l'auteur sur un centre d'accueil et prend la forme d'un journal de bord tenu par un demandeur d'asile. Le scénario raccorde les billets fragmentés du roman et les inscrit dans une narration polyphonique apportant au sujet une densité supplémentaire : Problemski Hôtel se nourrit des contrastes et les amplifie par une exploration de l'absurde qui agit comme un révélateur.

    Un centre d'accueil provisoire s'installe sur deux étages d'un immeuble bancaire désaffecté. Du toit-terrasse, Bruxelles se dessine en lignes graphiques et prend les allures grises de Gotham City. L'architecture fonctionnelle du bâtiment des années 70, presque brutaliste, offre ses vastes volumes vides à une réaffectation qui s'apparente à une installation artistique. Panoramiques et plans séquences s'approprient les lieux : les espaces communs et les zones privées contrastent avec le confinement des containers dans lesquels certains réfugiés viennent se cacher pour traverser la Manche. Les kilomètres parcourus éloignent des lointains pays dont il a fallu fuir, mais l'errance continue : désormais circonscrite aux plateaux presque déserts, elle passe de géographique à mentale. Hébergeant femmes, hommes et enfants dans un no man's land les soustrayant au monde, le camp d'hébergement a stoppé leur circulation mais pas leur existence.

    « Ce n’est pas un film sur les réfugiés : c’est un film sur des gens qui attendent d’être à nouveau considérés comme les autres. » Manu Riche pose ainsi les bases d'un récit à hauteur d'homme qui navigue entre réalité et fiction. Numéros de dossiers et procédures interminables agissent contre des individus qui luttent pour demeurer de simples êtres humains. Chacun travaille à sa survie et, mi-abasourdi mi-actif, bataille contre lui-même et les constantes désillusions pour envisager un avenir qui aurait vaincu la fatalité. Intenses mais fragiles, les relations amicales, amoureuses ou sexuelles concourent elles aussi à maintenir en vie.

    Le scénario transforme le narrateur du roman en réfugié amnésique : s'il parle plusieurs langues, Bipul ne sait pas d'où il vient et encore moins vers quelle destination il devrait partir. Tour à tour médiateur, traducteur et témoin, il transforme en pensées universelles les réflexions qui l'animent. Le plus souvent en retrait, s'adressant aux autres avec le même ton posé, il incarne une sorte d'ange protecteur à la présence rassurante. Ce calme presque irréel contraste avec la violence qui bouillonne en chacun. Enfouis mais revenant en cauchemars, présents sur un visage blessé, un corps enfanté par le viol, les traumatismes passés s'expriment à travers les coups de sang, les tentatives de suicide, les souvenirs d'une famille massacrée, les dessins d'un enfant, les rêves de fuite : Londres, la Légion Étrangère, un divorce, le mariage avec une citoyenne belge sonnent alors comme de possibles libérations.

    L'écriture précise et l'élégante réalisation impriment une douceur constante. La théâtralisation du réel permet de n'agresser ni les personnages ni les spectateurs : le jeu qui se joue s'inscrit dans un registre intime avec une intense volonté de partage. Trouvant toujours la bonne distance, le film travaille les circulations et croise les destins en évitant l'hystérisation d'une réalité dont personne ne comprend plus le sens.

    Cette dimension absurde s'exprime en gimmicks presque surréalistes qui apportent d'insolites déviations (un sapin découpé et promené d'étage en étage, le jogging d'une encadrante, la psychologue s'improvisant professeure de danse...) ; d'autres pauses scéniques, inserts visuels, plans silencieux ou musicaux ponctuent une narration dense, mais jamais pesante, jusqu'à une édifiante soirée de Noël. Alors que Problemski Hôtel évoque des histoires de vie terribles, impossibles, bouleversantes, le regard qu'il porte sur ses personnages sait manier l'ironie : quoi qu'il arrive, l'être humain n'oublie jamais d'être léger, drôle ou ridicule.

    Si le cinéaste revendique les influences de deux films d'enfermement (et de subversion), Vol au-dessus d'un nid de coucou et M.A.S.H, son long métrage rappelle immanquablement le cinéma de Resnais, de manière immédiate dans son intégration du burlesque (le footballeur de Providence...) mais aussi et surtout dans le rapport qu'il crée entre les individus et l'espace. L'architecture, les volumes et les perspectives, parties intégrantes de la dramaturgie d'Hiroshima mon amour ou de Muriel ou le temps d'un retour, interagissent entre l'homme et l'histoire du monde. Il en va de même ici quand la caméra filme des lieux vides, le dehors lointain et le dedans démesuré (guichets de banque fermés, cloisonnements bricolés, hall immense, escalier monumental) et contribue par leur exclusion à l'isolement des individus.

    Manu Riche a composé un casting qui permet à chaque comédien de nourrir son personnage de l'intérieur en ayant notamment des origines similaires. Il a confié le rôle de Bipul à Tarek Halaby, danseur né en Palestine puis exilé en Jordanie et à Dubaï avant de rejoindre Chicago. Le comédien et metteur en scène d'origine turque Gökhan Girginol interprète son ami Maqsoon et le lumineux personnage de Lidia revient à Evgenia Brendes qui a fait ses études au Conservatoire d'Anvers après avoir quitté le Kazakhstan. Autour d'eux, des dizaines d'acteurs composent une troupe dans laquelle chacun existe.

    La maîtrise avec laquelle la réalisation épouse son sujet et travaille ses différentes tonalités donne à Problemski Hôtel une identité puissante. Évoquant un sujet grave et ô combien d'actualité avec une acuité rare, Manu Riche construit un œuvre vibrante et profondément poétique.
    Cinéphiles 44
    Cinéphiles 44

    1 388 abonnés 4 208 critiques Suivre son activité

    4,0
    Publiée le 16 août 2017
    Des réfugiés de divers pays en guerre se retrouvent dans un hôtel désaffecté Bruxellois dans l’attente de papiers et d’une terre d’asile. Filmé comme un documentaire, nous suivons le quotidien décalé de ces habitants de toutes langues. Basé sur le roman de Dimitri Verhulst, Problemski Hotel est pourtant bien une fiction. Le mélange est alors assez troublant, car la métaphore de notre société occidentale est flagrante. Véritable satire, le film n’hésite pas à montrer les situations les plus absurdes grâce à des dialogues bien pensés et des jeux de rôles épatants. C’est un exercice de style brillant dans les échanges que Manu Riche nous démontre. A la fois hors du temps et terriblement actuel, Problemski Hotel puise sa force dans les débâcles et faux-semblants de notre système politique.
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