Voilà un film qui part de façon assez extraordinaire : les scènes d'accouchement, l'ambiance de la clinique avec des professionnels et, surtout, des professionnelles, qui font leur métier avec passion et compétence mais qui laisse deviner un gros malaise, la vie de Claire (la sage femme interprétée par Catherine Frot) en dehors du travail, tout cela est passionnant, remarquablement raconté, joué et filmé. Chef d'œuvre en perspective, se dit-on ! Et puis arrivent Béatrice, Paul, Simon. Béatrice, l'ancienne maîtresse d'Antoine, le père de Claire, partie sans crier gare plus de 30 ans auparavant et qui, atteinte d'un cancer, cherche à se raccrocher à des liens qu'elle avait toujours fuis dans le passé. Paul, le fils du voisin, chauffeur de poids lourds, qui, manifestement, tombe sous le charme de Claire. Simon, le fils de Claire, étudiant en médecine, qui vient annoncer à sa mère que Lucie, sa petite amie, et lui attendent un bébé.
L'interprétation de tous ces personnages est tout à fait remarquable, à l'exception, peut-être, de Quentin Dolmaire, peu convaincant dans le rôle de Simon : Catherine Deneuve (Béatrice) est carrément époustouflante, Olivier Gourmet (Paul) est, comme d'habitude, excellent. Pauline Parigot (Lucie) a un rôle mineur mais elle le défend très bien. Quant à Catherine Frot, qui joue le rôle de Claire, le personnage central, elle est égale à elle-même, c'est-à-dire très bonne.
Le problème que rencontre le film après ce début extraordinaire ne réside donc pas dans le jeu des comédien(n)s ni, d'ailleurs, dans la mise en scène. Il est plutôt dans la multiplicité des thèmes abordés par Martin Provost, ce qui, petit à petit, fait que le récit concernant chacun d'eux a tendance à s'étioler, que le film se met à ronronner, qu'on se met à percevoir certaines longueurs, voire à trouver sur la fin un caractère improbable à certaines scènes. C'est d'autant plus dommage en ce qui concerne le thème consacré aux personnages de Claire et de Béatrice : Claire, une femme qui se consacre corps et âme à son travail, mais qui se révèle plutôt fermée en dehors, une femme qui donne beaucoup aux autres mais qui se refuse à elle-même les plaisirs de l'existence, une femme qui refuse l'amour et prétend ne rien à avoir à donner aux hommes, une femme qui va évoluer petit à petit au contact de Béatrice, laquelle est tout son contraire et qui, de son côté, évolue dans l'autre sens, mais dans une bien moindre mesure. D'autant plus dommage car la peinture de ces deux évolutions, qui aurait pu être passionnante tout au long du film, souffre d'être trop souvent court-circuitée par le traitement de thèmes annexes.