La grande histoire rencontre la petite histoire. D'un côté, celle de la guerre terrible qui a opposé la Serbie à la Croatie, avec en filigrane les drames d'Auschwitz ou d'ailleurs, et de l'autre celle d'un hôtel qui s'apprête à recevoir une délégation européenne. Des personnages traversent ce récit conflictuel : un couple qui se dispute pour un achat de canapé, un acteur qui s'entraîne à une prestation théâtrale, des gardiens attelés à leur écran de surveillance, un directeur d'hôtel en proie à une grève de ses employés, un mafieux qui joue et perd avec délectation de l'argent, une journaliste qui interroge un militant, etc. Bref, "Mort à Sarajevo", c'est une multitude de figures et d'histoires pour un film au format relativement court, dans une mise en scène glaciale. On s'ennuie beaucoup, on perd le fil avec cet enchevêtrement de personnages. Seul peut-être Jacques Weber en comédien inspiré provoque quelques émotions véritables, notamment à l'évocation d'une Europe fracturée, qui n'a jamais pu repousser l'inimaginable des camps de la mort. Il y a pourtant de l'idée mais sans doute que le réalisateur a voulu trop dire. Il multiplie les points de vue qui égarent en route le spectateur, happé par la désespérance de la photographie et de la mise en scène. On court à la recherche d'un souffle, semblable à cette cheffe de rang dévouée, mais sans jamais trouver une once de vraisemblance. Néanmoins, "Mort à Sarajevo" rend un poignant hommage aux disparus de ce bout d'Europe qu'on aurait tendance à oublier, dans un négationnisme ambiant et terrifiant.