C’est un peu un retour aux sources que Houda Benyamina, diplômée en 2002 de l’École Régionale d’Acteurs de Cannes, a vécu lorsque « Divines », son premier long métrage, s’est retrouvé sélectionné pour la Quinzaine des réalisateurs de Cannes 2016. Un retour aux sources particulièrement fructueux puisque son film s’est vu attribué la Caméra d’Or par le jury présidé par Catherine Corsini. "Divines" fait partie de ces films a priori alléchants mais dont on ressort déçu, même si on leur reconnait un certain nombre de qualités. C’est en fait un mélange de fulgurances, de scènes très fortes ou très belles (celles qui réunissent Dounia et le danseur, par exemple) et de maladresses et de facilités. C’est ainsi que Houda Benyamina use et abuse des retournements de clichés, en donnant à Rebecca, la dealeuse en chef, toute la panoplie des comportements des mecs dans les films de gangsters, en faisant de Djigui, le danseur, le personnage le plus féminin du film, en donnant à Dounia le rôle habituellement aux hommes consistant à mater l’objet de son désir. Certes, ce retournement de cliché peut donner « Toi, t’as du clitoris », cette réplique qui va peut-être devenir culte, lancée par Rebecca à propos de Dounia, mais l’abus qu’en fait la réalisatrice a tendance à en émousser les effets auprès des spectateurs. Il reste toutefois que le plus gros reproche qu’on puisse faire au film réside dans la part beaucoup trop importante faite au culte du fric. C’est ainsi que, dès le début du film, lorsque Dounia s’oppose à sa prof, son argument ultime consiste à dire qu’elle arrivera à gagner plus d’argent que cette enseignante miséreuse ; le rêve de Dounia : une Ferrari ; ses premières entrées financières, l’achat de fringues et de chaussures de marque ; le fantasme qu’elle réalise : s’ébattre dans une baignoire remplie de billets de banque. Il est possible que Houda Benyamina ait cherché à montrer ainsi la puissance nocive de l’imaginaire ultra-libéral, mais, en supposant que cela soit le cas, elle l’a fait avec tellement de maladresse qu’on ressort du film en ayant en tête que la quête d’un maximum de fric peut justifier à peu près tout. Dommage, d’autant plus que ce n’est pas ainsi que tout un chacun pourra ressentir sans réserve une empathie généreuse pour Dounia et toutes ses sœurs !
Une réalité : "Divines" a obtenu une récompense prestigieuse, la Caméra d’Or, et, malgré un certain nombre de réserves sur son film, on ne peut que souhaiter une carrière florissante à Houda Benyamina. Il est fort possible que cette carrière lui tende les bras, à condition qu’elle arrive à garder le dynamisme de sa mise en scène tout en éliminant les facilités et les maladresses qui émaillent son premier long métrage.